Zimbabwe : un journaliste menacé en direct par un membre du gouvernement
Le journaliste Blessed Mhlanga du quotidien NewsDay a fait l’objet de menaces par le vice-ministre des Finances en pleine émission de radio, après avoir évoqué un article compromettant pour l’élu. Reporters sans frontières (RSF) alerte sur un climat d’hostilité préoccupant à l’encontre des médias à l’approche des élections générales.
L’altercation s’est passée en direct et a mis fin à l’émission. Le 24 mai dernier, le vice-ministre des Finances et député Terrence Mukupe était l’invité de la radio SFM pour débattre avec le journaliste Blessed Mhlanga de la Une du quotidien NewsDay publié la veille. Selon le récit du journaliste, l’élu s’est violemment emporté contre lui quelques minutes après l’ouverture du débat. “Je vais te tabasser pour vouloir me dénigrer”, a-t-il lancé. L’article faisait référence à une vidéo tournée quelques jours plus tôt dans les locaux du parti au pouvoir ZANU-PF, dans laquelle le vice-ministre déclarait que l’armée n’accepterait pas Nelson Chamisa, candidat de l’opposition, comme président s'il venait à gagner les prochaines élections générales qui auront lieu le 30 juillet.
“Ces menaces publiques à l’égard du journaliste sont d’autant plus inacceptables qu’elles viennent d’un membre du gouvernement, dénonce Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique à RSF. Nous demandons aux autorités du Zimbabwe qu’elles condamnent systématiquement ces attaques et ne les laissent pas impunies. Après les années de répression sous le régime de Robert Mugabe, il est temps que les médias et les journalistes soient reconnus comme des acteurs clés du débat public, particulièrement à l’approche des élections générales.”
Le 26 mai, Terrence Mukupe a publié une lettre affirmant que le journaliste avait eu un “comportement provocateur”. “Je suis choqué qu’un ministre puisse mentir en toute impunité sur des faits déroulés en direct sur les ondes”, a déclaré Blessed Mhlanga joint par RSF. Lorsque le journaliste est venu porter plainte au Commissariat, le vice-ministre l’avait précédé en présentant le journaliste comme l’agresseur dans une déposition.
MISA Zimbabwe, organisation de défense de la liberté d’expression, a condamné fermement cette agression, affirmant que ce genre d’attaque “sape le rôle constitutionnel des médias dans l’enracinement de la démocratie”.
Depuis l’arrivée du président Mnangagwa à la tête du pays en novembre 2017, et malgré ses promesses pour une nouvelle démocratie, les agressions à l’encontre des journalistes sont régulières, notamment sur les sujets politiques. Déjà en mars et en mai dernier, des journalistes avaient été menacés par des élus et un photographe brutalisé par des supporters du parti de l’opposition MDC-T. En avril, un journaliste avait également été arrêté pour avoir pris des photos lors d’une rencontre entre les membres du parti au pouvoir et les agents des bureaux de vote à l’occasion des élections primaires du ZANU-PF.
Le Zimbabwe occupe la 126e place sur 180 pays dans le Classement de la liberté de la presse établi par RSF en 2018.