Trois employés du portail d’information Dawei Watch arrêtés dans un nouveau coup de filet de l’armée birmane
Deux journalistes et un graphiste de Dawei Watch, média en ligne qui couvre l’actualité du sud de la Birmanie, ont été arrêtés par l'armée dans la nuit du mardi 18 au mercredi 19 janvier. Reporters sans frontières (RSF) exige leur libération immédiate ainsi que celle de la cinquantaine d’autres journalistes encore détenus par la junte.
Ils ont été interpellés au cours de raids nocturnes quasiment simultanés et travaillaient tous pour Dawei Watch, un média en ligne basé à Dawei, la capitale de la région de Tanintharyi à l’extrême sud du territoire birman.
D’après les informations recueillies par RSF auprès de la direction du site, la journaliste Moe Myint - également connue sous le nom de Yu Yu Maw - a été arrêtée mardi 18 janvier à 23h38. Son confrère, le reporter Than Zaw Tun - dit Ko Zaw - et le webdesigner Phyo Pyae Lay Lwin - surnommé Thargyi - ont été arrêtés dans la foulée, jeudi, entre minuit et deux heures du matin. Ko Zaw aurait été emmené hors de chez lui par les forces de sécurité, avec les mains liées dans le dos et un sac en tissu sur la tête.
Selon les médias locaux, les trois employés de Dawei Watch sont désormais détenus dans un poste de police de Dawei et leurs familles ont été autorisées à leur envoyer de la nourriture, des vêtements et des médicaments.
“Cette vague ciblée d’arrestations, soigneusement planifiée, constitue une nouvelle étape dans l’effroyable escalade de la terreur dans laquelle s'enferme la junte birmane, déplore le responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF, Daniel Bastard. RSF exige la libération immédiate des trois employés de Dawei Watch, ainsi que de la cinquantaine de leurs confrères actuellement maintenus derrière les barreaux. L’organisation appelle la communauté internationale à durcir les sanctions ciblées contre les dignitaires du régime. À quelques semaines du premier anniversaire du coup d’État du 1er février 2021, le monde ne peut plus regarder sans rien faire.”
60 détenus, 14 condamnés
Les bureaux de Dawei Watch ont été perquisitionnés peu de temps avant les arrestations. Dans les locaux, les forces de police ont saisi plusieurs documents et d’autres objets.
“Rien ne justifie cette vague d'arrestations”, estime un responsable de la rédaction de Dawei Watch qui s’est confié à RSF sous couvert d’anonymat, afin de ne pas compromettre sa sécurité : "Nous sommes un média indépendant depuis une décennie et nous rapportons les nouvelles sans parti pris. Cet incident est le contraire de ce qu’il se passe en démocratie”. Dawei Watch avait couvert les récentes manifestations contre le coup d'État, sur son site web et sa page Facebook, suivie par 380.000 personnes.
Un quatrième journaliste, Nay Lin Htike, a également été arrêté par la police dans la nuit du 20 au 21 janvier à Pégou, une ville (appelée Bago en birman) située dans le sud du pays. Les raisons de son interpellation, et notamment un lien éventuel avec son statut de journaliste, restent pour l’heure inconnues.
D’après le baromètre de RSF, le nombre de journalistes maintenus en détention dans les geôles birmanes s’élève désormais, au moins, à 60. Parmi eux, 14 ont été condamnés à des peines allant de deux à trois ans de prison au motif de l'article 205 du code pénal, qui punit notamment la diffusion d’informations susceptibles de porter atteinte aux fonctionnaires du gouvernement.
Le dernier en date est le reporter Tin Shwe, journaliste du Magway Post Journal basé à Minbu, dans le centre du pays. Arrêté en mars 2021, il a été condamné à trois ans de prison vendredi 21 janvier.
La Birmanie se situe actuellement à la 140e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF début 2021.