Le bicentenaire de l’indépendance, nouveau prétexte pour agresser les médias et les journalistes

Exclusif. Chaque semaine, Reporters sans frontières (RSF) passe au crible plus d’une centaine de comptes Twitter et Facebook de journalistes, d’autorités publiques et de candidats aux élections pour mieux comprendre l’origine et l’organisation de la dissémination de la haine en ligne contre la presse. La couverture médiatique faite le 7 septembre, date du bicentenaire de l’indépendance du Brésil, cristallise la majorité des attaques en ligne contre la presse, mais les femmes journalistes sont aussi victimes de nombreuses attaques misogynes. 

Entre le 4 et le 11 septembre, Reporters sans frontières (RSF) et le Laboratoire d’études sur l’image et la cyberculture (Labic) ont recensé 33 000 attaques contre la presse sur Twitter et 74 hashtags diffamants. La chaîne la plus puissante du pays, la Rede Globo et le hashtag #GloboLixo (#GloboPoubelle) reste, de loin et pour la quatrième semaine consécutive, le plus utilisé, avec près de 10 600 mentions. Mais CNN Brasil, le portail d'information UOL et le quotidien Folha de São Paulo font aussi les frais de cette haine en ligne via des hashtags insultants. 

En pleine campagne présidentielle, le Brésil a fêté le 7 septembre les 200 ans de son indépendance. Pour l'occasion, le président-candidat Jair Bolsonaro a rallié ses partisans dans les trois principales villes du pays : Brasilia, Rio de Janeiro et São Paulo. La couverture de cet évènement, ainsi que le discours du président-candidat ont été à l’origine des attaques en ligne les plus virulentes enregistrées contre les journalistes. RSF et le Labic constatent que les hashtags #Bolsonaroreeleitoem2022 (#BolsonaroRééluEn2022) et #Bolsonaronoprimeiroturno (#BolsonaroPremierTour) et #Jornalnacional (#JournalNational), #Globolixo (#GloboPoubelle) et #CNNlixo (#CNNPoubelle) sont souvent utilisés dans les mêmes tweets, témoignant du lien entre les publications qui attaquent la presse et celles qui soutiennent le président-candidat Bolsonaro.  

Cibles de la semaine 

Lors de cette quatrième semaine de campagne électorale, deux journalistes sont entrées dans le collimateur des agresseurs. Animatrice pour la RedeTV et éditorialiste sur la chaîne Jovem Pan, Amanda Klein a reçu près de 400 attaques misogynes sur son compte Twitter après avoir interrogé, le 6 septembre, Jair Bolsonaro sur les révélations du portail d’information UOL portant sur les 51 propriétés appartenant à la famille Bolsonaro achetées en argent liquide depuis les années 1990 (voir détails dans l’analyse du 4 septembre : Une journaliste dans l’œil du cyclone après la parution d’une enquête sur les biens immobiliers de la famille Bolsonaro). En guise de réponse, Jair Bolsonaro a répliqué : “Amanda, tu es mariée à une personne qui vote pour moi. Je ne sais pas comment tu vis avec lui chez toi.” Avant d’ajouter que la journaliste portait une “accusation frivole”. La présentatrice noire de CNN Brésil, Basília Rodrigues, a elle aussi fait les frais d’attaques misogynes et racistes sur Twitter (environ 250) après avoir critiqué l'instrumentalisation politique de la fête de l'indépendance par Jair Bolsonaro.

Enfin, la journaliste Vera Magalhães, qui a vu son portrait affiché en grand à côté du message “Tu es une honte pour le journalisme au Brésil” lors des manifestations du 7 septembre, continue de recevoir des messages violents sur Twitter (environ 2 200) après l’agression verbale de Jair Bolsonaro lors du débat sur la chaîne TV Bandeirantes, le 28 août.

 

Pour la quatrième semaine consécutive, les principaux profils Twitter des agresseurs des médias et journalistes (@antonioalvespho, @anderson_a_mach, @machadoands) déclarent tous leurs soutien au candidat d’extrême droite Jair Bolsonaro.

Lire l’analyse détaillée en portugais ici.

 

Publié le