Le 4 juillet 2014, plusieurs voitures de police ont encerclé le domicile du journaliste et militant sahraoui
Mahmoud Al-Lhaissan, situé au centre de la ville de Laâyoune, avant de conduire ce dernier vers un lieu inconnu. Pendant 48 heures, aucune information n’a filtré sur son lieu de détention, jusqu’à ce que des associations locales de défense des droits de l’homme annoncent son transfert à la prison de Lakhal à Laâyoune. Il est officiellement
poursuivi pour “atroupement armé”, “obstruction de la voie publique”, “agression sur des fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions” et “dégradation de biens publics” .
Laarbi Massoud, secrétaire général du Collectif de défenseurs des droits de l'homme (Codesa, ONG sahraouie) conteste cette version des faits. Pour lui, est en cause la couverture, par Mahmoud Al-Lhaisan, des
manifestations pacifiques organisées à Laâyoune, par des Sahraouis venus fêter le match Algérie/ Allemagne, lors de la Coupe du monde de football au Brésil, le 30 juin dernier. Rassemblement qui a rapidement été l’occasion - pour les participants - de lancer des slogans politiques en faveur de l’indépendance du Sahara occidental, avant d’être violemment dispersé par les forces de l’ordre. D’après le secrétaire général du Codesa, le reportage de Mahmoud Al-Lhaisan - qui ferait état des excès de violence déployée par les forces de l’ordre pour disperser les manifestants sahraouis - a par la suite été diffusé sur la chaîne
Rasd TV.
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Nous avons contacté en vain, le 10 juillet dernier, le ministère de la Communication. Aussi, nous demandons aux autorités marocaines d’apporter des éclaircissements sur les motifs de l’arrestation de Mahmoud Al-Lhaisan, d’autant que les versions sur les raisons de l’arrestation de ce journaliste et militant - diamétralement opposées - nous conduisent à nous interroger sur le caractère politique de cette affaire, déclare Virginie Dangles, adjointe à la direction de la Recherche de Reporters sans frontières.
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Reporters sans frontières rappelle que la détention d’un journaliste en raison de ses activités professionnelles constitue une violation des engagements internationaux du Maroc en matière de respect de la liberté d’information. Par ailleurs, les autorités marocaines se doivent également d’ouvrir une enquête sur les allégations - de l’avocat de Mahmoud Al-Lhaissan - de mauvais traitements en détention”.
En effet, les membres de la famille du journaliste rapportent que le lendemain de son
arrestation, Mahmoud Al-Lhaissan aurait été présenté devant le procureur du roi, et placé immédiatement en détention. Son
avocat rapporte pour sa part avoir constaté des traces de coups sur le corps du journaliste. Le secrétaire général du Codesa a pour sa part déclaré à Reporters sans frontières que Mahmoud Al-Lhaissan aurait été menacé par les agents de police lors de son audition.
L’Union des journalistes et écrivians sahraouis (
UPES) a vivement
condamné cette arrestation, tout en exhortant les autorités marocaines à libérer le journaliste.
Basée dans le camp de réfugiés sahraouis de Smara, près de la ville de Tindouf en Algérie, la chaîne
Rasd TV a été
lancée en 2009 par le Front Polisario, qui se bat en faveur de l’indépendance du Sahara occidental, sous contrôle marocain depuis 1975.