Russie : RSF dénonce l’acharnement judiciaire subi par deux journalistes enquêtant sur la corruption dans la police
Emprisonnés depuis près de dix mois, Aleksandr Dorogov et Ian Katelevski ont vu leur détention provisoire de nouveau prolongée. Reporters sans frontières (RSF) dénonce un acharnement inacceptable et demande la remise en liberté immédiate des deux journalistes.
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Ils restent en prison. Jeudi 20 mai, la justice russe a décidé de prolonger la détention d’Aleksandr Dorogov et Ian Katelevski jusqu’à fin juillet. Les deux rédacteurs en chefs adjoints du site d’investigation indépendant Rosderjava ont été arrêtés dans la nuit du 28 au 29 juillet 2020 près de Moscou par une vingtaine d’agents des forces spéciales russes. Ils sont accusés d’avoir extorqué plus d’un million de roubles (environ 11 140 euros) à un agent de police chargé de la circulation en échange de l’arrêt de publications critiques le concernant.
Aleksandr Dorogov et Ian Katelevski, qui ont notamment publié des enquêtes sur la corruption de hauts fonctionnaires de la police par des entreprises funéraires, risquent jusqu’à 15 ans de prison. Ils considèrent que cette affaire pénale est montée de toutes pièces pour leur nuire.
“Les enquêteurs semblent incapables de trouver des preuves de la culpabilité d’Aleksandr Dorogov et Ian Katelevski, pourtant incarcérés depuis près de dix mois, affirme la responsable du bureau Europe de l’Est et Asie centrale de RSF, Jeanne Cavelier. La police doit mettre fin à cet acharnement qui s’apparente à des représailles contre leurs enquêtes sur la corruption dans ses rangs. RSF demande aux autorités russes de les relâcher immédiatement et d’abandonner toutes les poursuites à leur encontre.”
D’après les avocats des deux journalistes, les enquêteurs cherchent à connaître leurs sources et menacent de durcir leurs conditions de détention, déjà difficiles, s’ils ne coopèrent pas. Souffrant de problèmes urinaires, qui l’empêchent de rester longtemps en position debout, Aleksandr Dorogov est traité en prison avec des antidouleurs périmés. Ses problèmes de santé se sont aggravés en août 2020 après qu’il a été violemment frappé, à plusieurs reprises, par des gardiens puis des co-détenus coopérant avec l’administration pénitentiaire. Son avocat a notamment rapporté l’avoir vu avec des ecchymoses sous l'œil gauche et à l'épaule gauche, une oreille déchirée, des côtes cassées, les avant-bras et une jambe blessés.
La Russie qui, entre l’année 2020 et l’année 2021, a perdu une place au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF, est désormais 150e sur les 180 pays évalués.