Le 18 septembre vers 20 heures, les rebelles houthis d’“Ansar Allah” ont commencé à bombarder les locaux de la télévision nationale (qui abritent trois chaînes satellitaires gouvernementales - à savoir
Yemen TV,
Seba TV et
Eman TV), situés dans le quartier de Jiraf à Sanaa, ainsi que les quartiers environnants. Le pilonnage a duré trois jours pendant lesquels les tirs d’obus de mortiers ont causé la destruction partielle des bâtiments. Un
incendie a endommagé une partie des locaux le 20 septembre. La diffusion des programmes a été interrompue durant plus de deux heures ce même jour, avant de reprendre depuis un autre lieu. Des centaines de journalistes et employés de la télévision se sont
retrouvés pris au piège dans ces bâtiment assiégés et visés. Les rebelles
accusent la télévision nationale de manquer de neutralité et d’impartialité dans sa couverture des
événements opposant les rebelles et les forces de sécurité depuis le début de l’année 2014.
Malgré le cessez-le-feu signé le 21 septembre, des membres de la rébellion houthie ont pris le contrôle, le 22 septembre dans la soirée, des bâtiments de la chaîne
Suhail TV situés rue Al-Rabat à Sanaa, saccageant et pillant les locaux. Une nouvelle fois, des journalistes et employés se sont retrouvés
piégés, sans moyen de communication. La chaîne a été
contrainte d’interrompre la diffusion de ses programmes. A noter que
Suhail TV appartient au Cheikh Hamid Al-Ahmar, un des leaders des Frères musulmans au Yémen et membre de la puissante tribu sunnite des Al-Ahmar, en conflit avec les Houthis.
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Reporters sans frontières condamne avec la plus grande fermeté ces attaques délibérées de la télévision gouvernementale yéménite et de la chaîne Suhail TV, qui a mis en danger la vie de nombreux employés et journalistes, déclare Virginie Dangles, adjointe à la direction de la Recherche de Reporters sans frontières.
Les attaques ciblées contre les civils constituent des crimes de guerre et des infractions graves aux Conventions de Genève pour lesquels les responsabilités doivent être établies”.
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L’organisation exhorte l’ensemble des parties du conflit à respecter l’intégrité des médias, et le travail des professionnels de l’information. Les médias et leurs collaborateurs, de leur côté, doivent accomplir leur travail d’information en faisant preuve d’indépendance et de professionnalisme, et en n’alimentant pas les tensions et différends politiques”.
Le 20 septembre, la télévision yéménite a lancé un
appel à l’aide au gouvernement ainsi qu’à des organisations humanitaires locales et internationales.
Un porte-parole des Houthis, Mohamed Abdulsalam, a nié que les “Ansar Allah” aient initié les attaques contre le siège de la télévision. Selon lui, ces bombardements ne sont qu’une
riposte aux tirs lancés contre les rebelles houthis par une brigade stationnée dans les environs des locaux de la télévision officielle.
Des membres armés du groupe houthi ont également bombardé le 19 septembre des quartiers résidentiels. Les domiciles de deux journalistes de la chaîne privée
Yemen Shabab TV ont été touchés. Le présentateur
Mohamed Al Jama’i, et le journaliste
Ibrahim Al Haidam, ainsi que leurs familles, ont
échappé de justesse à la mort. La veille, la prise d’assaut du siège de la chaîne
Sky News a été évitée grâce à des pourparlers.
Les combats entre les forces de l’ordre et les rebelles houthis dans la capitale se sont intensifiés le 18 septembre 2014 dans la capitale, conduisant à l’instauration d’un couvre-feu le 20 septembre, et à la démission du Premier ministre le lendemain. L’
accord de cessez-le-feu signé le 21 septembre vise à la formation d’un nouveau gouvernement prévoyant une représentation de la rébellion houthie ainsi que du mouvement sudiste. D’après le ministère de la santé, les récents combats ont causé
la mort de plus de 200 personnes.
Les professionnels de l’information yéménites avaient déjà été pris pour
cibles lors des affrontements entre les rebelles houthis et le clan rival Al-Ahmar ces derniers mois dans le nord du Yémen.
Le Yémen figure à la 167e place sur 180 du Classement 2014 de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières.