Yémen : les quatre journalistes retenus en otage depuis huit ans enfin libérés
Quatre journalistes condamnés à mort et retenus en otage depuis huit ans par les rebelles houthis au Yémen ont été libérés dans le cadre d’un échange de prisonniers avec le gouvernement officiel. Reporters sans frontières (RSF) se réjouit de cette nouvelle, espère que ces journalistes pourront reprendre leur travail en toute sécurité, et demande que leurs confrères, toujours en détention, soient également relâchés.
Ils ont réapparu le 16 avril à la descente d’un avion de la Croix-Rouge sur le tarmac de la ville de Marib, à l'est de Sanaa, contrôlée par le gouvernement yéménite. Quatre journalistes condamnés à mort pour espionnage, victimes de torture et retenus en otage par les Houthis depuis 2015, Abdul Khaleq Amran, Tawfik al-Mansouri, Hareth Homaid et Akram al-Walidi, sont enfin libres et ont pu retrouver leurs familles.
Leur libération s'inscrit dans le cadre d'un échange de près de 900 prisonniers entre les rebelles chiites houthis – soutenus par l'Iran – et le gouvernement officiel – reconnu par la communauté internationale et soutenu par une coalition menée par l'Arabie saoudite. L’accord entre les deux parties en guerre avait été conclu à Genève le 20 mars dernier, sous les auspices de l’Organisation des Nations unies, dix jours exactement après le rétablissement des relations diplomatiques entre l'Iran et l'Arabie saoudite.
“Nous attendions ce jour depuis des années. Nous nous réjouissons de leur libération. Cela rappelle à quel point la liberté des journalistes dépend trop souvent des tractations politiques à l'œuvre dans leur pays et rarement du travail qu'ils effectuent. Nous leur souhaitons un bon rétablissement et demandons la libération de tous les autres journalistes détenus au Yémen.
Confirmant les informations rapportées par RSF en décembre 2022, Tawfik Al-Mansouri raconte avoir été systématiquement torturé par ses geôliers au cours de sa captivité. "La dernière fois, c'était le 20 août 2022 […] Nous sortons de l’enfer", a-t-il déclaré à la presse. Pendant huit longues années, les quatre journalistes ont été coupés du monde. Aucun d’entre eux n’a été autorisé à communiquer avec les membres de sa famille.
Enlevés le 9 juin 2015 à Sanaa, Abdul Khaleq Amran, Tawfik al-Mansouri, Hareth Homaid et Akram al-Walidi étaient accusés d’avoir “créé et tenu plusieurs sites et pages sur Internet et les réseaux sociaux” dans l’intention de “diffuser des informations et des rumeurs fausses et malveillantes”, et avaient été condamnés à mort le 11 avril 2020 par un tribunal houthi pour espionnage au profit de l’Arabie Saoudite. Rédacteur en chef du site Al-Islah Online, Abdul Khaleq Amran dirigeait la Yemen Revolution Press, une agence créée en 2011 regroupant plusieurs médias. Le journaliste Hareth Humaid, qui rendait publiques les exactions commises par les Houthis, et Tawfiq Al-Mansouri, ancien journaliste du quotidien Al-Masdar, travaillaient tous les deux pour la Yemen Revolution Press. De son côté, Akram Al-Walidi supervisait les équipes du site d’information Alrabie-ye.net et de l’agence de presse officielle SABA.
En 2021, les rebelles houthis avaient accepté d'échanger les quatre journalistes contre d'autres prisonniers, mais avaient finalement changé d'avis à la dernière minute, préférant les garder comme monnaie d'échange politique.
Cinq autres journalistes et collaborateurs de médias sont toujours retenus en otage par les Houthis, dont Mohamed Al Salahi, Muhammad Ali Al-Junaid, Nabil Al-Sadawi et Walid Al-Matari.