Reporters sans frontières condamne fermement le blackout médiatique annoncé par le gouvernement du 16 au 17 septembre, date des élections législatives. L’ensemble des médias se voit ainsi interdit de publier ou diffuser toute information relative au scrutin, sous peine d’amende ou d’emprisonnement.
A 48 heures d’un scrutin historique pour les Fidji, les autorités ont imposé des restrictions abusives entravant sévèrement le travail des médias sous prétexte de permettre aux électeurs de voter sans influence excessive. En plus d’interdire toute publicité pour les partis politiques et leurs candidats, le
décret électoral n°11 proscrit interviews et débats politiques ayant trait aux élections. Cette prohibition s’appliquerait également aux réseaux sociaux et à tout site d’information, sans que soient précisés les moyens mis en oeuvre pour l’application du décret. Les journalistes étrangers sont également concernés par ce décret si leurs publications sont “accessibles par la population fidjienne”. L’Autorité de développement de l’industrie des médias (Media Industry Development Authority, MIDA), a toutefois autorisé la publication de certaines informations, dont celles provenant du bureau national des élections mais a demandé aux médias de lui soumettre leurs reportages avant publication ou diffusion.
Selon le paragraphe 4 du décret, tout contrevenant s’expose à des peines pouvant atteindre 10 ans d’emprisonnement et 50 000 dollars fidjiens d’amende (environ 20 000 euros).
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L'ampleur de la censure instaurée par ce décret est totalement démesurée, déclare Benjamin Ismaïl, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières.
Si des restrictions en matière de sondage, de projection de chiffres, d’annonce de résultats, et même de publicité politique sont tout à fait compréhensibles, interdire tous commentaires politiques pendant plusieurs jours ou instaurer une censure préalable est tout simplement inapplicable dans les faits et liberticide.”
D’après le blog
Café Pacific du professeur et directeur du
Pacific Media Centre, David Robie, 450 journalistes sont accrédités pour la couverture des élections, y compris 37 journalistes étrangers.
Alors que le blackout est désormais en vigueur depuis plusieurs heures, plusieurs sources d’information en ligne font état de messages sur les réseaux sociaux en violation directe avec le décret. Leurs auteurs n’auraient cependant pas été jusqu’ici sanctionnés par les autorités.
En octobre 2014, la situation des droits de l'homme dans le pays sera examinée par le Conseil des droits de l’homme dans le cadre des Examens périodiques universels (EPU). A cette occasion, Reporters sans frontières et le Pacific Media Centre ont
soumis une contribution écrite recommandant notamment une modification de la Constitution et la promulgation d’une loi sur la liberté de l’information.
Les Fidji figurent à la 107e place sur 179 pays dans le
Classement de liberté de la presse en 2014.