Journalistes ou contributeurs réguliers dans des médias marocains comme
Lakome2 ou
Zamane,
Maati Monjib,
Samad Ayach,
Maria Moukrim,
Rachid Tarik et
Hicham El Mansouri, tous membres de l’Association marocaine du journalisme d’investigation (AMJI), sont poursuivis pour « atteinte à la sécurité de l’Etat » et pour « financement étrangers illégaux ». Ils devraient être jugés ce jeudi. Le procès concernera aussi
Hicham Khreibchi, connu sous le nom de
Hicham Al-Miraat, ancien directeur de l’Association des droits numériques (ADN) et
Mohamed Essabeur, président de l’Association marocaine pour l’éducation de la jeunesse (AMEJ).
Selon nos sources, les autorités marocaines leur reprochent de ne pas respecter les normes professionnelles de “rigueur” et de “déontologie” du journalisme d’investigation, contribuant à travers leurs publications à ternir l’image du pays.
“
Il est urgent que le Maroc cesse le harcèlement politico-judiciaire à l’encontre des journalistes, visant ainsi à décourager toute voix critique, déclare Yasmine Kacha, responsable du bureau Maghreb de RSF.
Les charges portées par les autorités marocaines contre ces journalistes et militants des droits de l’homme doivent être abandonnées conformément aux engagements internationaux du pays, notamment à son obligation de protéger le droit à la liberté d’expression et d’information prévu dans l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques”.
Afin de museler ces défenseurs de la liberté d’expression et de l’information, les autorités utilisent de nombreux recours juridiques aussi vagues que pénalisants. Ainsi, l’invocation des dispositions de l’article 206 du code pénal prévoyant l’« atteinte à la sécurité de l’Etat » fait suite, selon nos informations, à la publication de plusieurs articles critiquant le Royaume chérifien, notamment
celui de Monjib,
diffusé sur Orient XXI le 30 mars 2015. Les écrits de
Samad Ayach dans
Lakome2, très critiques envers la gestion du gouvernement marocain, seraient aussi une source d’inquiétude pour les autorités. La publication d’un rapport dénonçant les pratiques de surveillance des autorités marocaines par ADN et Privacy International en juin 2015, et que notre organisation avait
soutenu, est aussi visée par cet article de loi, pouvant mener à une condamnation allant jusqu’à cinq ans de prison.
L’article 8 de la loi sur les associations du 15 novembre 1958 utilisé pour poursuivre
Moukrim et
Tarik, respectivement rédactrice en chef de
febrayer.com et ex-présidente de l’AMJI, et ancien journaliste du
Matin et président actuel du même organisme chercherait à limiter les activités de formation de l’organisation. En effet, l'association s’était donnée pour objectifs dans son plan d’action de 2014 de former à l’investigation et de proposer des bourses et prix pour les meilleures enquêtes. Les journalistes risquent une amende de 1200 à 5000 dirhams.
Harcèlement des autorités
Pour rappel,
Hicham Mansouri purge une peine de dix mois de prison pour complicité d’adultère, dans un procès entaché d’irrégularités. RSF avait
appelé à la libération du journaliste en avril 2015.
Maati Monjib et
Samad Ayach ont pour leur part été interdits de quitter le territoire marocain en juin et septembre 2015. Au terme d’une grève de la faim qui aura duré plus de vingt jours,
Monjib a obtenu la levée de cette interdiction.
Samad sera à l’extérieur du pays le 19 afin de participer à un atelier sur le journalisme citoyen.
Reporters sans frontières a publié en septembre 2015
un état des lieux de la situation de la liberté de la presse au Maroc. Y était mentionnées les pressions que subissaient les journalistes notamment lorsqu’ils décidaient de confronter les lignes rouges que sont : l’islam, l’intégrité territoriale (Sahara occidental) et la monarchie, sujets encore hautement sensibles.