NDTV suspendue pendant 24h pour avoir révélé “des informations stratégiquement sensibles”
Reporters sans frontières (RSF) condamne l’ordre d’interruption de 24h émis par une commission gouvernementale à l’encontre de la chaîne d’information NDTV suite à la couverture d’une attaque contre une base militaire indienne en janvier dernier. L’organisation appelle le gouvernement à cesser d’invoquer la sécurité nationale pour museler les médias.
En vertu de nouveaux règlements introduits en juin 2015 et permettant au gouvernement d’émettre des ordres de fermeture allant jusqu'à trente jours - sans recourir à un juge - , la chaîne d’information NDTV s’est vue ordonnée d’interrompre ses programmes durant 24h le 9 novembre prochain à partir de minuit. La commission interministérielle du Ministère de l’Information et de l’Audiovisuel a estimé que la chaîne avait révélé des “informations stratégiquement sensibles” sur la base de Pathankot au Pendjab (Nord) durant l’attaque menée par un groupe terroriste originaire du Pakistan. L’ordre, publié le 2 novembre, indique que le reportage de la chaîne comportait des détails sur les avions de chasse, le stock de munitions, les lance-roquettes, les mortiers, les hélicoptères et les réserves de carburant qui allaient probablement être utilisées par les terroristes eux-mêmes ou leurs coordinateurs pour causer d’importants dégâts (...) et attenter à la vie de civils et des forces de sécurité ”. Sept militaires indiens ont été tués durant l’assaut. La commission a également affirmé que la chaîne avait enfreint les règles interdisant aux diffuseurs de couvrir en direct des opérations anti-terroristes par les forces de sécurité.
“Cette sanction constitue un message dissuasif en direction de la chaîne et de tous les médias dont la ligne éditoriale ne conviendrait pas aux autorités,” déclare Benjamin Ismäil, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières. En contraignant la chaîne à interrompre temporairement ses programmes, le gouvernement n’ignore pas qu’il inflige une sanction financière sans avoir besoin d’exiger le paiement d’une amende. Dans le même temps, il rend visible cette sanction auprès du public. Face à cette réponse disproportionnée, nous demandons l’annulation de cette sanction. La fermeture d’un média, même temporaire, ne saurait être prononcée par quiconque hormis un juge, sans attenter à la liberté de la presse garantie par la constitution indienne. Les règles relatives aux opérateurs du câble de 1994 doivent être réformées” .
NDTV a rétorqué le jour même affirmant que sa couverture des événements avait été similaire aux autres médias et dénonce une sanction la ciblant de manière délibérée. Des chaînes de télévision ont déjà été suspendues par le gouvernement indien mais c’est la première fois que celui-ci émet un ordre de fermeture temporaire à l’encontre d’une chaîne d’information en vertu des normes de couverture du terrorisme, en vigueur depuis 2015.
L’Inde pays occupe la 133e place dans le classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.