Les journalistes, ces “pirates” dont le ministre à la Présidence veut se débarrasser
Reporters sans frontières (RSF) condamne l’agression du journaliste Khadar Abi Hasan, le 11 septembre, à Hargeisa, et exprime son inquiétude face à la vindicte d’un membre du gouvernement à l’encontre des professionnels des médias.
Vraisemblablement, certains membres du gouvernement n’aiment pas les journalistes qui s’intéressent de trop près à la gestion des comptes publics. En témoigne la dernière déclaration de l’actuel ministre en charge des Affaires présidentielles, Mahmoud Hashi Abdi : “Nous avons libéré notre pays de ces chefs de guerre qui faisaient chanter le peuple avec leurs fusils. Nous libérerons notre pays de ces pirates qui nous font chanter avec leur plume”.
Le bureau à Hargeisa du collectif de journalistes The Somaliland Online Media Association (SOMA) a immédiatement condamné les déclarations du ministre et appelé les associations de défense des droits de l’homme et de l’information à réagir.
“ Il est impensable que le ministre Mahmoud Hashi Abdi bafoue publiquement la Constitution de son propre pays qui garantit, en son article 32, la liberté de l’information pour se défendre des accusations de détournement de fonds qui le visent", déclare Virginie Dangles, rédactrice en chef de RSF. "RSF condamne fermement les menaces publiques proférées par le ministre et s’inquiète de la systématisation de ces vindictes à l’encontre des médias et des journalistes dès lors qu’une publication met en cause les activités de membres du gouvernement.”
En juin 2016, le directeur du journal Foore, Abdirashid Abdiwahaab Ibraahim, et son rédacteur en chef Mohamed Mahamoud Yousuf, avaient été arrêtés pour “publications de fausses nouvelles appelant à la sédition” et “propagande subversive ou anti-nationale” alors qu’ils couvraient l’accord passé entre les autorités et l’entreprise DP World concernant la gestion du port de Berbera.
Reporters sans frontière s’inquiète enfin de la détention arbitraire du journaliste free-lance, enseignant et poète Said Mohamoud Gahayr. Incarcéré depuis cinq semaines à la prison de Hargeisa, il purge une peine extrajudiciaire de deux mois pour “sédition". Il avait été arrêté le 20 août dernier après la parution sur les réseaux sociaux d’articles relatant l’affaire de corruption visant Mahmoud Hashi Abdi.