L’armée israélienne menace Wattan TV d’un raid
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Reporters sans frontières a appris avec consternation et inquiétude que les avocats de la chaîne palestinienne Wattan TV, basée à Ramallah, Me Mikhal Sfarad et Me Noa Amrami, avaient reçu, le 24 avril 2014, un message de l’unité juridique de l’armée israélienne menaçant la chaîne d’un nouveau raid si celle-ci continuait à diffuser ses programmes. Tsahal justifie cette demande en arguant du fait que la chaîne aurait obtenu illégalement une nouvelle fréquence, sans respecter les dispositions prévues dans l’accord Oslo II et qu’elle constituerait une atteinte à la sécurité de la région.
“Cette lettre constitue une énième menace, d’une violence considérable, de l’armée israélienne contre Wattan TV, alors même que la chaîne s’est pliée à la demande de la Haute Cour de justice israélienne de décembre dernier en obtenant une nouvelle fréquence de diffusion de la part du ministère palestinien des Télécommunications, déclare Lucie Morillon, directrice de la Récherche à Reporters sans frontières.
“Il nous paraît désormais évident que quelles que soient les démarches entreprises par la chaîne, l’armée israélienne fera tout pour la faire taire. Ira-t-on jusqu’à un nouveau raid, comme celui qui a eu lieu en février 2012?”
Pour le directeur de la chaîne, Moamar Orabi, contacté par Reporters sans frontières, il s’agit d’une nouvelle forme de pression exercée par l’armée israélienne contre la chaîne, “mais nous refusons d’aller dans ce sens. La demande de l’armée israélienne n’est pas légale puisque la chaîne a une autorisation officielle d’émettre, délivrée par le ministère palestinien des Télécommunications”.
Dans une interview au site Amad, Muamar Orabi déclare avoir “consulté plusieurs experts dans le domaine des frequences, et ils nous ont tous affirmé que la chaîne ne causait aucun problème d’interférence ni de brouillage, et ne constitue aucun danger pour leur sécurité comme ils le prétendent. Ces allégations sont fausses, et leur objectif n’est autre que d'entraver le travail des médias palestiniens, ce qui constitue une atteinte à la liberté d'expression.”
Reporters sans frontières rappelle que Wattan TV fait l’objet d’un acharnement des autorités militaires israéliennes depuis plusieurs années. Le 29 fevrier 2012, les locaux de la chaîne avaient été pris d’assaut par l’armée qui avait confisqué une partie du matériel, notamment de transmission, ainsi que les archives de la chaîne depuis l’année 2002. La Haute Cour de justice israélienne a décidé, le 4 décembre 2013, de ne pas revenir sur la décision de l’armée de confisquer les appareils de transmission de Wattan TV. Estimant que Wattan TV utilisait une fréquence illégale pour diffuser ces programmes, la Haute Cour avait exigé de la chaîne qu’elle obtienne une nouvelle fréquence de l’Autorité palestinienne.
Malgré les nombreuses demandes des organisations de défense de la liberté de la presse dont Reporters sans frontières et des avocats de la chaînes, la cour a concédé - après avoir reçu des informations confidentielles au cours d’une session ex parte - que la diffusion des programmes de Wattan TV interférait avec certaines communications qui révêtaient un aspect sécuritaire, et par conséquent que la confiscation du matériel de transmission était légale. Wattan TV a demandé à la cour de lui accorder un délai afin d’otebnir une nouvelle autorisation pour une fréquence. Délai accordé (et prolongé), malgré une objection de l’armée. L’Autorité palestinienne a par la suite alloué une nouvelle fréquence à la chaîne. Mais les Israéliens qui - en vertu de l’accord intérimaire de 1995 entre Israël et l’OLP - sont censés donner leur consentement, ont refusé d’aller dans ce sens.
Wattan TV a alors demandé à la cour d’ordonner à l’armée israélienne de lui retourner le matériel de transmission confisqué, tout en promettant de ne pas les utiliser, tant que la nouvelle fréquence ne serait pas approuvée. La chaîne attend depuis la décision de la Haute cour de justice.
Parallèlement, les autorités israéliennes ont obligé la direction de la chaîne Al-Chiraa Al-Mahalli TV, dans la ville de Tulkarem, à suspendre momentanément d’émettre en février dernier, sous peine de confiscation de l’intégralité du matériel. Elles avaient alors évoqué le même pretexte selon lequel des interférences de la chaîne perturbaient l'aéroport Ben Gourion, ainsi que les communications d’Israël. D’après les déclarations au journal Al-Hayat Al-Jadida, de Mohamad Zaydan, directeur de la chaîne, “nous avons fait venir un comité d’experts du ministère des Télécommunications et des ingénieurs de l’université Al-Najah. Après avoir vérifié tous les dispositifs et équipements appartenant à Al-Chiraa Al-Mahalli, ces experts ont conclu que la chaîne fonctionnait selon des normes officielles”.
Publié le
Updated on
20.01.2016