Arrêté il y a neuf mois, le 22 juillet 2014, par les Gardiens de la Révolutionn dans l’illégalité la plus totale et emprisonné depuis dans la section sécuritaire de la prison d'Evin, le journaliste, comme tous ses collègues emprisonnés en Iran, a été mis soumis à de longues périodes d’isolement et à de fortes pressions pour obtenir des aveux, utilisés par la suite contre eux lors de leurs procès.
Le 20 avril 2015, Me Leila Ahsan a déclaré à l'Agence France-Presse que son client : "est accusé d'espionnage, de collaboration avec des gouvernements hostiles, de collecte d'informations confidentielles et de propagande contre la République islamique". L'avocate a expliqué élégamment qu'elle “a vu le journaliste pour la première fois depuis qu'elle a pris en charge le dossier début mars."
Une semaine avant cette déclaration officielle, le 12 avril 2015,
Farsnews, l’agence de presse proches des Gardiens de la Révolution, avait déjà annoncé que “le journaliste est accusé d'espionnage et il va être jugé pour avoir "vendu des informations économiques et industrielles à la CIA.” Le
Washington Post, par la voix de Martin Baron, son rédacteur en chef, répliquait le jour même en qualifiant les informations de l'agence iranienne d’”absurdes” et en dénonçant "un manque inacceptable d'accès à tout conseil juridique au cours des neuf derniers mois d'emprisonnement du journaliste”.
Le 18 avril 2015, le quotidien extrémiste
Vatan-é Emrooz, proche des Gardiens de la Révolution et de l’ancien président de la République Mahmoud Ahmadinejad, publiait un article délirant en Une. Sous le titre « dévoiler les secrets de Jason», le quotidien accuse le journaliste notamment d’infiltration dans les institutions et le gouvernement pour dévoiler le système établi par le pays pour contourner les sanctions internationales.
“Depuis le 3 avril 2015, et après l’accord entre l’Iran et les Etats-Unis sur le programme nucléaire, l’affaire Jason Rezaian a été évoquée par les opposants à cet accord et à la normalisation de la relation avec la communauté internationale. Ce n’est pas un hasard. Jason Rezaian a été arrêté et emprisonné dans le but d'être utilisé dans cette guerre acharnée au sommet du pouvoir”, déplore Reza Moini, responsable du bureau Iran/Afghanistan de Reporters sans frontières.
“Malheureusement, les gouvernements de Barack Obama et de Hassan Rohani ont laissé faire et ont manqué l’opportunité de faire de la question des droits de l’homme et de la libération des journalistes une priorité dans les discussions. Nous demandons la libération immédiate de Jason Rezaian et tous les journalistes et net-citoyens détenus.”
Le 22 juillet 2014,
Jason Rezaian et son épouse
Yeganeh Salehi, également journaliste pour The National, un journal basé aux Emirats arabes unis, ainsi que deux autres ressortissants américains, ont été arrêtés en même temps par des agents en civil des Gardiens de la Révolution à leur domicile de Téhéran. Lors de la perquisition, leur appartement a été saccagé, et l’ensemble des équipements informatiques confisqué. Les deux ressortissants américains ont été libérés provisoirement un mois plus tard. Yeganeh Salehi a, elle, été libérée provisoirement le 4 octobre 2014 contre le versement d’une lourde caution dans l’attente de son jugement.
Sa famille a depuis le début demandé à l’administration Obama «de faire la libération de Jason Rezaian une de ses priorités”. Son frère, Ali, s’est adressé directement aux autorités iraniennes : “Maintenant qu’un accord a été trouvé, nous demandons aux dirigeants iraniens d’examiner les preuves que leurs sous-fifres prétendent détenir à l’encontre de Jason”.
A ce jour, Plus de 400 000 personnes ont signés
une pétition relayée également par RSF pour la liberation du journaliste. Une dizaine de figures emblématiques du monde médiatique, notamment Noam Chomsky, Anderson Cooper, Christiane Amanpour, Marty Baron et John Hughes President de National Press Club, ont cosigné, avec Christophe Deloire, secrétaire général de l’organisation, une lettre adressée (le lien ) au chef du pouvoir judiciaire, Sadegh Amoli Larijani, demandant la libération immédiate du correspondant du Washington Post.
Jason Rezaian n'est pas le seul acteur de l’information bénéficiant d’une double nationalité à croupir en prison en Iran.
Roya Saberi Negad Nobakht, de nationalités britannique et iranienne, a été condamnée à 20 ans de prison, le 27 mai 2014, par la 28ème chambre du Tribunal de la révolution de Téhéran, avant de voir sa peine réduite à cinq ans début avril.
Farideh Shahgholi, une Germano-Iranienne, purge une peine de trois ans de prison ferme. Toutes deux ont été arrêtées pour leurs activités sur les réseaux sociaux notamment Facebook.
Le président américain Barack Obama avait demandé au bout des lèvres, dans ses vœux pour le nouvel an iranien, le 20 mars 2015, la libération Jason Rezaian. Les autorités britanniques et allemandes n’ont pas, à ce jour, fait de déclaration officielle sur la détention de leurs ressortissants. Il est temps que la communauté internationale aborde sérieusement avec les autorités iraniennes la question du respect des droits fondamentaux et notamment la libération des journalistes et net-citoyens emprisonnés.
L’Iran est classé 173e sur 180 dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2015 de Reporters sans frontières.