Etats-Unis - RSF salue la libération prochaine du lanceur d’alerte Jeffrey Sterling
Reporters sans frontières (RSF) se réjouit de la remise en liberté prochaine du lanceur d’alerte de la CIA, Jeffrey Sterling, qui avait été condamné à une peine de prison de 3 ans et demi et qui devait initialement être libéré le 14 juin 2018. Jeffrey Sterling sera conduit dans une maison de transition le 16 janvier.
Jeffrey Sterling a passé 2 ans et demi 2 ans et demi dans une prison du Colorado après avoir été reconnu coupable, en 2015, de sept chefs d’accusation dans le cadre de l’Espionage Act par un tribunal de Virginie pour le simple fait d’avoir été en contact avec un journaliste. Cet ancien agent de la CIA avait été accusé d’avoir communiqué des informations classées ‘secret défense’ concernant l’opération “Merlin”, qui visait le programme nucléaire iranien, à un journaliste du New York Times, James Risen. Ce dernier avait décrit cette opération de la CIA dans son livre “État de guerre'.
Au cours du procès de Jeffrey Sterling, le ministère de la Justice a été dans l’incapacité de présenter la moindre preuve directe attestant que l’accusé avait bien divulgué des informations classifiées à James Risen. Seules des preuves circonstancielles, consistant uniquement en plusieurs courriers électroniques et conversations téléphoniques, avaient été utilisées pour démontrer sa culpabilité à un jury enclin à le condamner. Etant donné que Jeffrey Sterling a utilisé des canaux de communication appropriés et a informé la Commission du Sénat sur le Renseignement de son inquiétude quant à la sécurité du peuple américain, RSF le considère comme un lanceur d’alerte et le soutient.
‘Nous saluons la décision de libérer Jeffrey Sterling et de le conduire dans un centre de transition, mais nous espérons qu’il pourra retrouver sa famille au plus vite’, a déclaré la directrice du bureau Amérique du Nord de RSF, Margaux Ewen. Sa condamnation a représenté une atteinte au Premier amendement de la Constitution américaine. Le simple fait d'être en contact avec un journaliste n’équivaut pas à de l’espionnage et ne justifie certainement pas une peine de prison.’
‘Je suis ravie à l'idée que mon cher mari soit transféré dans un centre de transition même si je redoute qu’il y reste jusqu’au mois de juin’, a pour sa part affirmé sa femme, Holly Sterling. ‘Nous voulons commencer à reconstruire notre vie, que le gouvernement a mis beaucoup d'énergie à détruire, et nous savons que ce sera un processus compliqué. Jeffrey est désormais marqué au fer rouge comme un traître pour son pays, un pays qu’il aime pourtant toujours.’
L’administration de Barack Obama a poursuivi plus de lanceurs d’alerte que toute autre administration confondue. Durant sa présidence, huit lanceurs d’alerte, dont Jeffrey Sterling et l’ancienne analyste militaire Chelsea Manning, ont été poursuivis dans le cadre de la loi sur l’espionnage pour avoir dévoilé des informations secrètes. Le président Trump ne devrait pas améliorer cette situation : au cours de sa première année de mandat, il a clairement affirmé que les lanceurs d’alerte et les journalistes devraient être condamnés en cas de divulgation ou de publication d’informations classifiées.
L’actuel procureur général des Etats-Unis, Jeff Sessions, a lui-même illustré cette prise de position en refusant à plusieurs reprises de garantir la protection des journalistes qui ne divulgueraient pas leurs sources. En novembre dernier, il avait affirmé que son cabinet enquêtait sur 27 cas de fuites d’informations. Moins de six mois après l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, une ancienne contractuelle de la NSA, Reality Winner, a par ailleurs été arrêtée et mise en examen, dans le cadre là encore de l'Espionage Act, pour avoir collecté, divulgué, ou égaré des informations classées “secret défense”. Sa mise en examen est survenue peu après la publication par le site d’information en ligne The Intercept d’un article présentant un document de la NSA qui démontre une ingérence russe dans l’élection présidentielle de 2016.
En partie à cause de la répression exercée par le président Obama envers les lanceurs d’alerte, les Etats-Unis ont chuté de deux places dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2017.