El Salvador : RSF dénonce les attaques à répétition contre les journalistes de Revista Factum
Reporters sans frontières (RSF) condamne la recrudescence des attaques subies par les membres de la rédaction du site d’investigation salvadorien Revista Factum, et demande au nouveau président Nayib Bukele de ne pas stigmatiser les journalistes dans le pays.
Bien qu’ils bénéficient de mesures conservatoires de la Commission interaméricaine des droits de l'homme (CIDH) de l’Organisation des États Américains (OEA) depuis 2017, les journalistes du site salvadorien Revista Factum, une référence du journalisme d’investigation en Amérique centrale, sont à nouveau la cible de campagnes de diffamation et d’intimidations sur internet. Ces menaces se sont intensifiées depuis le début de la période électorale de 2019 qui a porté Nayib Bukele à la présidence du pays.
Quelques heures après son élection, lors de sa première intervention publique, diffusée en direct sur Facebook , Nayib Bukele a multiplié les critiques contre la presse, allant jusqu’à dresser une liste de de journalistes désignés comme des “adversaires politiques agissant de façon manichéenne et dont l’intention est de déstabiliser le gouvernement”. Parmi ces derniers se trouvait le directeur de Revista Factum, Héctor Silva Ávalos. Depuis lors, les attaques, insultes et menaces contre le site et ses représentants se sont démultipliées, principalement sur les réseaux sociaux.
La plupart des messages vise à décrédibiliser le travail de Revista Factum, sur la base de fausses accusations de conspiration contre le gouvernement et d’association avec des gangs et des groupes criminels. Les journalistes Fernando Romero et Bryan Avelar, notamment, ont été été exposés à de graves menaces en ligne et ciblés par des campagnes haineuses sur Twitter, orchestrées par des comptes anonymes.
« RSF manifeste tout son soutien à Revista Factum et dénonce fermement les attaques et tentatives honteuses d’associer le journal à des groupes criminels », déclare Emmanuel Colombié, directeur du bureau Amérique Latine pour RSF. “Le nouveau gouvernement du Salvador a la responsabilité de garantir la protection des journalistes, et ne doit en aucune circonstance stigmatiser la profession”
En 2017, après avoir dévoilé l’existence et le mode opératoire de groupes d’extermination liés aux forces de sécurité de l’Etat, Les journalistes de la Revista Factum avaient déjà été victimes de harcèlement et reçu des menaces de mort. La Commission interaméricaine des droits de l'homme (CIDH) de l’OAS avait alors octroyé des mesures conservatoires à l’ensemble de la rédaction, et sommé l'État salvadorien d’assurer leur protection.
Les cas de cyberharcèlement et les campagnes de diffamation contre la presse sont fréquents au Salvador. La journaliste Karen Fernandez a été violemment attaquée sur Twitter après avoir été interviewée, le 28 juin 2019, dans l'émission "Republica SV", de la chaîne Canal 33. Une partie de son intervention a été partagée sur les réseaux sociaux et généré de nombreux commentaires haineux. Le président Nayib Bukele a lui même relayé cette intervention, engendrant une vague supplémentaire d'attaques et de commentaires misogynes à connotation sexuelle, visant à décrédibiliser la journaliste.
El Salvador occupe la 81e place parmi 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2019, établi par Reporters sans frontières.