Des militants proches du gouvernement ont une nouvelle fois interrompu la formation à destination d’une quinzaine de journalistes tamouls à Colombo, le 26 juillet. Ces interférences répétées, souvent accompagnées de menaces de mort, constituent le quotidien des journalistes tamouls.
Pour réprimer les médias, les autorités sri-lankaises s’attellent désormais à leur dénier le droit à se former. La session organisée, les 26 et 27 juillet, par le Sri Lanka Press Institute à Colombo, portant sur l’utilisation en toute sécurité des technologies de l’information et de communication (Technology Safety workshop), a été interrompue lorsque des manifestants sont arrivés sur les lieux et ont menacé les organisateurs. Les journalistes se rendant à cette formation avaient auparavant été arrêtés et retardés pendant plusieurs heures par des contrôles effectués par des militaires, ces derniers accusant le chauffeur du véhicule de transporter du cannabis. Suite à ces événements, le coordinateur et porte-parole du Free Media Movement (FMM),
Sunil Jayasekara a organisé une conférence de presse dénonçant cet acharnement à l’encontre des journalistes tamouls. Il a reçu en retour sept menaces de mort, toutes anonymes.
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Les autorités sri-lankaises doivent immédiatement cesser leur politique de répression à l’encontre des médias, et plus particulièrement des journalistes tamouls. Ceux-ci sont systématiquement pris pour cible par les militaires car ils font partie des derniers journalistes à s’intéresser aux questions épineuses des exécutions extrajudiciaires, des enlèvements, de la militarisation du nord du pays et de la spoliation des terres”, déclare Benjamin Ismaïl, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières.
Une répression croissante en réaction aux demandes d’enquêtes sur les crimes de guerre
La répression des médias tamouls s’est renforcée lorsque le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a demandé, en mars 2014, une enquête sur les crimes de guerre qui auraient été commis entre 2002 et 2009. Des journalistes tamouls auraient alors commencé à enquêter sur des affaires de viols d’enfants commis par des militaires dans le nord du pays.
Une formation organisée par Transparency International Sri Lanka (TISL) pour les journalistes tamouls avait déjà été interrompue le 7 juin dernier, sur ordre du ministère de la Défense, afin d’empêcher ces derniers d’aider les enquêteurs de l’ONU dans leur travail. Treize journalistes tamouls avaient été forcés de quitter l’hôtel où se tenait la formation. Le responsable de TISL, Shan Wijetunga, également cible de menaces de mort, avait alors mis en avant que les formations organisées ne présentaient des problèmes aux autorités que lorsque des journalistes tamouls étaient concernés.
Afin d’empêcher de nouvelles formations, le ministère de la Défense a émis, le 1er juillet dernier, une directive interdisant aux organisations non-gouvernementales (ONG) d’organiser des activités qui se situeraient “en dehors de leur mandat”, telles que des “conférences de presse, des ateliers, des formations pour les journalistes et la diffusion de communiqués de presse”. Les ONG, organisant de telles activités, ont ainsi été sommées d’y mettre un terme.
En dépit de la longue liste d’atteintes à la liberté de l’information enregistrées depuis la fin officielle de la guerre civile en 2009, le porte-parole du ministère de la Défense, Ruwan Wanigasooriya,
a assuré publiquement, le 29 juillet dernier, qu’“il n’y avait pas eu une seule attaque signalée de journalistes au cours des dernières années”.
Le Sri Lanka figure à la 165e place sur 180 pays dans le
Classement mondial de la liberté de la presse 2014 établi par Reporters sans frontières.
Photo:
Tamilguardian