Covid-19 en Ouganda : vague d’agressions envers les journalistes
Reporters sans frontières (RSF) condamne les agressions répétées de journalistes par des policiers chargés de faire respecter le couvre-feu mis en place pour lutter contre la pandémie de Covid-19 en Ouganda. Notre organisation demande aux autorités de ne pas utiliser les mesures sanitaires pour restreindre la liberté de la presse.
C’est la quatrième fois que cela se produit en moins de six semaines. Dimanche soir, un policier a violemment frappé au visage Patrick Bukenya, journaliste à la station de radio privée 98.0 Mityana FM, alors qu'il rentrait chez lui. Le motif ? Le journaliste ne respectait pas le couvre-feu de 19 heures mis en place pour lutter contre la pandémie de Covid-19. Les journalistes sont pourtant considérés comme des travailleurs essentiels dans le pays et sont donc autorisés à travailler après 19 heures.
Le 30 juillet, alors qu’il prenait des photos d’officiers dispersant des habitants durant le couvre-feu, Scovin Iceta, qui travaille pour la station de télévision NTV Uganda et pour le quotidien le Daily Monitor, s’est aussi fait agresser par des policiers, alors qu’il portait une veste de presse l’identifiant en tant que journaliste. Deux autres journalistes ont été attaqués dans des conditions similaires en lien avec leur couverture du couvre-feu dans les jours précédents. Sam Welikhe de la radio Elgon FM basée à Mbale dans le sud-est du pays et Arinaitwe Emmanuel Kajungu de Radio Ankole, dans le sud-ouest, ont tous deux été frappés par la police alors qu’ils rentraient chez eux.
“Alors que la pandémie frappe de plein fouet l’Ouganda, ces attaques perpétrées à l’encontre des journalistes sont alarmantes, déplore Pauline Adès-Mével, la porte-parole de RSF. Rien ne justifie un tel traitement de la part des forces de police. Ces atteintes à la liberté de la presse sont contraires aux directives officielles qui autorisent les journalistes à travailler pendant le couvre-feu. Nous demandons aux autorités de ne pas se tromper d’ennemi et de ne pas utiliser les mesures en place pour lutter contre la crise sanitaire comme prétexte pour brutaliser les journalistes et restreindre la liberté d’informer.”
Depuis le début de l’épidémie ayant touché plus de six millions de personnes et causé plus de 170 000 décès en Afrique, RSF a recensé 129 atteintes à la liberté de la presse en Afrique subsaharienne, qu’il s’agisse d’arrestations et d’agressions de journalistes ou de sanctions imposées aux médias. Avec 13 cas d’attaques commises contre des journalistes et 16 atteintes en tout, l’Ouganda cumule à ce jour le plus grand nombre d’exactions dans la région. La plupart ont été commises par des éléments des forces de sécurité.
L’Ouganda a perdu 28 places depuis 2015 et occupe actuellement la 125e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2021.