L'ensemble des journalistes du quotidien disparu Daily News sont menacés d'être condamnés à des peines de prison, tandis que la Commission des médias et de l'information (MIC) a dépassé le délai qui lui était imparti pour examiner la demande de licence déposée par le journal. Reporters sans frontières appelle la communauté internationale, et particulièrement le président sud-africain, à se mobiliser pour « montrer aux journalistes indépendants zimbabwéens que l'enfer qu'ils traversent n'est pas tolérable ».
L'ensemble des journalistes du quotidien disparu Daily News sont menacés d'être condamnés à des peines de prison, tandis que la Commission des médias et de l'information (MIC) a depuis longtemps dépassé le délai qui lui était imparti pour examiner la demande de licence déposée par le journal.
Reporters sans frontières recense chaque semaine de nouvelles attaques contre la presse indépendante au Zimbabwe, sans que l'une des dernières démocraties à pouvoir encore dialoguer avec le président Robert Mugabe, l'Afrique du Sud, ne s'en inquiète outre mesure. L'organisation lance donc un « appel solennel » au président Thabo Mbeki pour qu'il prenne conscience que les journalistes zimbabwéens indépendants font preuve d'un « exemple d'esprit démocratique en luttant pacifiquement » tout en subissant une « traque quotidienne de la part d'un gouvernement autoritaire à la dérive ».
« L'inaction des démocraties africaines face à la révoltante situation de la presse indépendante au Zimbabwe est un exemple déplorable pour le continent tout entier, a ajouté Reporters sans frontières. Thabo Mbeki, si habile à obtenir des compromis et à apaiser les conflits, ne fait pourtant rien pour améliorer le sort des esprits libres aux frontières de son pays. Pourtant, appuyé par l'Union africaine (UA), il en aurait le pouvoir. »
« Banalisée, et donc oubliée par l'opinion publique internationale, la répression contre la presse zimbabwéenne doit cependant cesser, a conclu l'organisation. Pour parvenir à cet objectif, il est déterminant que la communauté internationale utilise tous les moyens politiques et médiatiques à sa disposition, et montre ainsi aux journalistes indépendants zimbabwéens que l'enfer qu'ils traversent n'est pas tolérable. »
Les 45 journalistes du Daily News et de son supplément hebdomadaire The Daily News on Sunday doivent comparaître, le 12 octobre 2005, devant un tribunal de Harare pour répondre de l'accusation de violation de la loi sur l'information en ayant exercé le métier sans accréditation officielle entre janvier et septembre 2003, date de la suspension du journal. Le procès a été renvoyé à une audience groupée, fixée le
12 octobre par le tribunal. Aux termes de la loi draconienne sur la presse, dite Access to Information and Protection of Privacy Act (AIPPA), les journalistes doivent être dûment enregistrés par la MIC, l'organe de régulation des médias étroitement contrôlée par le pouvoir. Depuis la fin de l'année 2004, une peine de deux ans de prison est prévue pour les contrevenants.
Le 14 juin, 21 journalistes, qui ont reçu une convocation individuelle à leur domicile, ont déjà comparu devant le tribunal de Harare. 23 autres devraient recevoir à leur tour une convocation, la police n'ayant pas réussi à tous les localiser. Le journaliste Kelvin Jakachira, quant à lui, a été convoqué le 4 août pour répondre des mêmes charges.
Parallèlement, la MIC n'a toujours pas statué sur la demande de licence déposée par la société éditrice du Daily News, Associated Newspapers of Zimbabwe (ANZ). Pourtant, l'interminable bras de fer judiciaire entre le quotidien indépendant Daily News et le gouvernement du Zimbabwe avait connu un dénouement le 14 mars, après que la Cour suprême avait « annulé » l'interdiction de parution prononcée en septembre 2003 par la MIC. Cette dernière était alors contrainte de statuer une nouvelle fois sur la demande de licence de l'ANZ dans un délai de 60 jours, expirant le 15 mai. Pourtant, la MIC a attendu les 16 et 17 juin pour examiner officiellement cette demande, ainsi que celle de l'hebdomadaire The Tribune, suspendu pour un an en juin 2004. Après deux jours de débats, le président de la MIC, Tafataona Mahoso, s'est refusé à tout commentaire, affirmant que les journaux concernés connaîtraient l'arrêt de la commission lorsqu'« ils auront pris leur décision », sans préciser à qui il faisait référence.
The Daily News et son édition dominicale avaient été interdits en septembre 2003. Une bataille judiciaire s'était alors engagée entre l'ANZ et la MIC qui, de tribunal en tribunal, était remontée jusqu'à la Cour suprême en février 2004, laquelle avait attendu un an avant de statuer. Confrontée à d'énormes difficultés financières et pour ne pas exposer ses journalistes à des arrestations, la direction du Daily News avait décidé de cesser sa parution en attendant l'arrêt de la plus haute juridiction du pays.