Cameroun : désolant épilogue de l’interminable procédure engagée contre Amadou Vamoulké

Après près de sept ans de détention préventive et de procédure, Amadou Vamoulké a été condamné à 12 ans de prison ferme par un tribunal qui l’a reconnu coupable de “détournement de fonds publics”. Reporters sans frontières (RSF) dénonce une peine aussi sévère que grotesque et demande l’abandon des charges contre le journaliste.

La 151e audience à laquelle a été convoqué l’ancien directeur général de la radiotélévision publique camerounaise (CRTV), Amadou Vamoulké, le 20 décembre 2022, n’a pas été reportée comme les précédentes. Cette fois, les juges ont rendu leur décision et elle est particulièrement sévère :  le journaliste  a été condamné à 12 ans de prison ferme et à verser une amende de 47 millions CFA (70.000 euros) après avoir été reconnu coupable de “détournement de fonds publics”, et notamment d'avoir perçu illégalement des frais de congés à hauteur de 16 millions de francs CFA (environ 24.300 euros) et d'avoir versé, sans autorisation du conseil d'administration, des compléments de salaire au personnel du ministère des Finances affecté à la CRTV.

“ L’épilogue de l’interminable procès contre Amadou Vamoulké est aussi désolant que grotesque. Comment la justice a-t-elle pu condamner un journaliste à 12 ans de prison alors que les autorités, qui l’accusent de détournement de fonds, n’ont jamais présenté le moindre élément de preuve tangible ?  Ce dossier est totalement vide. Les charges contre Amadou Vamoulké doivent être abandonnées et le journaliste libéré immédiatement."  

Sadibou Marong, directeur Bureau Afrique subsaharienne de RSF. 

Ses avocats  ont déposé un pourvoi en cassation devant la Cour Suprême le 21 décembre.  Ils estiment que leur client a été condamné “illégalement à 12 ans de prison par un tribunal aux ordres, le président ayant suspendu la lecture du verdict dactylographié pour lire un document manuscrit.” 

Amadou Vamoulké a été arrêté le 29 juillet 2016. En six ans et demi, il a été conduit pas moins de 150 fois de sa cellule au tribunal criminel spécial de Yaoundé, avant d’être officiellement condamné. RSF avait adressé une plainte en juin 2020 au Groupe de travail des Nations unies sur les détentions arbitraires qui avait qualifié la détention de Vamoulké d’arbitraire. Le Groupe avait aussi conclu que la détention de Vamoulké n’avait “pas de base légale” car elle allait “au-delà de la limite maximale prescrite par la loi, et sans explication suffisante du caractère raisonnable et nécessaire de cette mesure”. Le groupe d’experts s'était déclaré “profondément préoccupé” par la “gravité de l’état” du journaliste dont le diagnostic d’une pathologie qualifiée de sévère par les experts médicaux qu’il a pu consulter n’a jamais été suivi d’un protocole médical adapté.

Le Cameroun occupe la 118e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2022. 

 

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