Bangladesh : Les journalistes Farzana Rupa et Shakil Ahmed doivent être libérés

Accusés de conspiration et de complicité dans les meurtres de manifestants lors des révoltes étudiantes et en détention provisoire depuis quatre jours, les journalistes Farzana Rupa et Shakil Ahmed ont vu leur détention provisoire prolongée de cinq jours. Reporters sans frontières (RSF) appelle à leur libération et à l’abandon des chefs d’accusation qui les visent : les professionnels de l’information ne sauraient être tenus pour responsables de ces assassinats en raison de leur traitement de l’information.

Déjà éreintés par leur tentative de fuir le pays et par quatre jours de détention provisoire, Farzana Rupa et Shakil Ahmed, jusqu’à récemment présentatrice et directeur de l’information du canal tout-info Ekattor TV, ont comparu dans la soirée du 26 août devant un tribunal de police de Dacca, la capitale du Bangladesh. 

L’audience, très suivie dans le pays, s’est soldée par une prolongation de cinq jours de la détention provisoire du couple fraîchement licencié de la chaîne privée, jugée favorable à l’ancien pouvoir. Ils sont accusés de conspiration en vue de commettre un meurtre, dans le cadre d’un vaste procès visant également l’ancienne Première ministre pour le meurtre d’un manifestant, Mohammed Rubel, à la suite d’une plainte déposée par son père au commissariat d’Adabor, à Dacca. Quelques jours auparavant, ils ont comparu pour complicité de meurtre pour la mort d’un autre manifestant, Fazlul Karim, dans le secteur d’Uttara East, également dans la capitale. 

Shakil Ahmed et Farzana Rupa, qui elle collaborait également avec plusieurs médias internationaux, viennent aussi, en marge de leur audience du 26 août, d’être ajoutés à la liste des suspects d’une troisième affaire de meurtre d’un autre manifestant.

“RSF suit avec inquiétude les développements kafkaïens de cette enquête judiciaire. Les chefs d’accusation de conspiration en vue de commettre un meurtre et de complicité de meurtre contre des journalistes sont infondés, outranciers et dignes des méthodes de l’ancienne Première ministre Sheikh Hasina. RSF appelle les autorités intérimaires à agir d’urgence pour la libération des journalistes et l’abandon des charges qui les visent. Les professionnels des médias doivent être protégés et ne pas faire les frais de la vindicte publique visant l’ancien gouvernement. Ils ne sauraient être les bouc-émissaires des pratiques condamnables de l’ancien régime.

Antoine Bernard
Directeur du plaidoyer et de l’assistance de RSF

Quatre autres professionnels des médias suspectés de meurtre

Le 26 août, en marge de leur audience, le couple de journalistes a également été ajouté à la liste des suspects d’une troisième affaire de meurtre d’un autre manifestant, Nayeem Howlader, âgé de 17 ans, tué dans le quartier de Jatrabari, à Dacca. Figuraient à leurs côtés dans ce dossier, quatre autres professionnels des médias : Mozammel Babu, directeur de la rédaction d’Ekattor TVSyed Ishtiaque Reza, PDG et rédacteur en chef de Global TelevisionAhmed Zobair, PDG et directeur de la chaîne privée d’information en continu Somoy TV et Munni Saha, ancienne directrice de l’information de la chaîne ATN News.

Les journalistes paient un lourd tribut à la transition politique en cours au Bangladesh. Cinq d’entre eux ont perdu la vie dans la répression sanglante des manifestations anti-gouvernement initiées début juillet par les étudiants. 

Les professionnels des médias étaient déjà harcelés sous le règne de l’ancienne Première ministre Sheikh Hasina : le pays est passé, entre 2023 et 2024, de la 163e à la 165e place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.

Image
165/ 180
Score : 27,64
Publié le