Afghanistan : “Sans garantie pour la liberté de la presse, il n’y aura pas de paix juste et durable” !
À l'occasion du 3 mai, la journée mondiale de la liberté de la presse, Reporters sans frontières (RSF) et le Centre pour la protection des journalistes afghanes (CPAWJ), alertent sur la situation des médias dans le pays et s’inquiètent pour l’avenir de la profession.
Plus d’un an après l’accord de paix entre les Talibans et les Etats-Unis, signé le 29 février 2020, et huit mois après le début des négociations de paix entre les Talibans et le gouvernement afghan, le 12 septembre 2020, le bilan est catastrophique pour la liberté de la presse en Afghanistan. Au cours des six derniers mois, au moins une vingtaine de journalistes et collaborateurs des médias ont été victimes d’attentats ciblés. Huit d’entre eux ont été tués, dont quatre femmes. Une trentaine d’autres ont reçu des menaces de mort en raison de leur travail d’information.
Le climat de terreur qui ne cesse de s’accroitre dans le pays touche particulièrement les femmes journalistes, déjà dans une situation précaire et fragile. Dans son dernier rapport annuel, publié en mars 2021, le CPAWJ a recensé au moins une centaine de cas de violences - assassinats, menaces de mort, agressions physiques, insultes - à l’encontre des femmes journalistes. “Ce n’est pas seulement l’insécurité qui a renforcé la précarité des journalistes afghanes, elles sont également durement touchées par les conséquences du confinement lié à la pandémie de Covid-19, explique la directrice du CPAWJ, Farida Nekzad. Au moins 20 % d’entre elles ont perdu leur emploi ou ont été contraintes à prendre un congé sans solde par leur employeur”.
Les menaces et la violence contre les journalistes ont des conséquences directes sur les médias et rendent leur travail particulièrement complexe. Le phénomène génère de l’autocensure sur de nombreux sujets, notamment sur ceux compromettants pour les conditions de paix imposées par les forces étrangères ou les différents clans au pouvoir et les Talibans. Ces derniers ont d’ailleurs menacé des journalistes et responsables de médias dans plusieurs provinces du pays, alors que les pouvoirs locaux ont exigé l’arrêt de certains programmes politiques ou de divertissement.
“La paix et la coexistence pacifique est une véritable revendication de la population en Afghanistan, déclare le responsable Iran-Afghanistan de RSF, Reza Moini. Mais elle ne pourra être assurée sans la participation de l’ensemble de la société, et ne pourra se faire sans une presse libre et indépendante.”
“Sans garantie pour la liberté de la presse, il n’y aura pas de paix juste et durable”, alertent RSF et le CPAWJ. Les deux organisations appellent à agir pour mettre en oeuvre une véritable protection des journalistes, renforcer les lois et s’assurer du respect de la Constitution et des décrets de la République islamique d’Afghanistan qui, depuis 19 ans, garantissent la liberté de la presse, la protection des journalistes, et en particulier les droits des femmes journalistes.
L’Afghanistan se situe à la 122e place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.