Un des
100 héros de l’information de Reporters sans frontières est libre depuis le 4 juillet.
Condamné le 7 avril 2014 à un an de prison ferme pour “intrusion” et “perturbation d’un fonctionnaire en service”,
Zaw Phay a vu sa peine d’emprisonnement réduite à trois mois par la cour du district de Magwe. Cette réduction de peine intervient alors que les journalistes et le PDG d’
Unity attendent le verdict de la même cour suite à la publication par l'hebdomadaire d’un article révélant l’existence d’une usine secrète d’armement chimique. Accusés d’avoir violé la loi sur les secrets d’Etat et d’avoir pénétré dans une zone d’accès restreint, les journalistes risquent jusqu’à 14 ans d’emprisonnement. Ils sont détenus depuis le mois de février dans la prison de Pakokku.
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Nous sommes soulagés d’apprendre la remise en liberté de Zaw Phay, même si elle intervient 83 jours trop tard, le journaliste ayant été injustement emprisonné. Nous demandons à la cour de Magwe de ne pas faire la même erreur et d’abandonner les charges qui pèsent contre les journalistes d’Unity”, déclare Benjamin Ismaïl, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières.
En août 2012, Zaw Phay, accompagné d’un parent d’élève, Win Myint Hlaing, s’étaient rendus au département de l’Education de Magwe pour interroger un fonctionnaire sur des irrégularités dans l’allocation d’une bourse d’étude japonaise. Ce fonctionnaire a par la suite déposé plainte contre le journaliste et le citoyen venus l’interroger. Zaw Phay et Win Myint Hlaing ont été convoqués puis détenus, et le matériel du journaliste a été confisqué. L’audience au tribunal de la ville de Magwe, qui s’est tenue deux ans après les faits, les avait condamnés à un an de prison.
Le verdict rendu lors du procès en appel a reconnu que les deux personnes avaient agi comme “des journalistes enquêtant simplement sur un programme éducatif sans commettre les infractions pour lesquelles le tribunal municipal les avait condamnés”. Etant tous deux emprisonnés depuis trois mois, ils ont donc pu être remis en liberté.
A l’annonce de la décision de la cour d’appel, Zaw Phay a déclaré par téléphone: “Je n’ai pas à être reconnaissant de quoi que ce soit. Je n’aurai jamais dû être emprisonné en premier lieu”.
Les journalistes d’Unity toujours menacés d’emprisonnement
La loi sur les secret d’Etat est l’une des menaces qui continuent de peser sur les journalistes birmans et qui prouve que le travail de réforme du cadre juridique concernant la liberté de l’information dans le pays est loin d’être terminé.
Emprisonnés depuis début février 2014,
Lu Maw Naing,
Yarzar Oo,
Paing Thet Kyaw (
Aung Thura),
Sithu Soe et leur PDG Tint San arrivent au terme de leur procès. L’article à l’origine de l’affaire avait été publié le 25 janvier dernier. Intitulé : “Une usine secrète d’armement chimique appartenant à des anciens généraux, et des techniciens chinois vus dans la ville de Pauk” (“A secret chemical weapon factory of the former generals, Chinese technicians and the commander-in-chief at Pauk Township”), l’article révélait l’existence d’une usine secrètement réaffectée en site d’armement avec l’accord du gouvernement au plus haut niveau, l’ancien commandant en chef de l’armée et les vice-présidents successifs ayant régulièrement visité l’usine entre 2009 et 2013.
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Tant que l’ensemble des textes répressifs ne seront pas abrogés et que de nouvelles protections ne seront pas adoptées par l’appareil législatif, les acteurs de l’information demeurent davantage vulnérables face aux attaques de certains détenteurs du pouvoir qui, malgré la fin officielle du régime militaire, témoignent de la permanence de leur volonté d’un contrôle strict de l’information”, ajoute Benjamin Ismaïl.
Les journalistes ont été arrêtés dans la semaine qui a suivi la publication de l’article et sont détenus depuis à la prison de Pakokku. Leur demande de remise en liberté sous caution leur a été refusée en raison de la gravité des charges à leur encontre. Les avocats des journalistes estiment que la cour devrait juger les journalistes en fonction de la loi sur les médias plutôt que celle sur les secrets d’Etat. L’incarcération des journalistes et de leur directeur a contraint
Unity à fermer ses bureaux de Rangoun le 30 juin pour faire face aux difficultés financières que rencontre l’hebdomadaire.
Malgré sa remontée au cours des deux dernières années, la Birmanie se positionne à la 145e place sur 180 pays dans le
Classement mondial de la liberté de la presse 2014 établi par Reporters sans frontières.