Un journaliste libéré mais deux autres condamnés à des peines de prison
Organisation :
Alors que Alireza Eshraghi a été libéré, sous caution, à l'issue de
53 jours de détention en cellule individuelle, deux autres journalistes, Narghues Mohammadi et Ahmad Zeid-Abadi, ont été condamnés à respectivement douze et treize mois de prison. Cinq autres journalistes spécialisés dans le cinéma demeurent incarcérés.
"Bien que nous nous réjouissions de la libération de M. Eshraghi, nous estimons inadmissible de réclamer une somme aussi élevée pour le remettre en liberté. Non seulement la justice emprisonne des journalistes de façon totalement arbitraire mais, en plus, elle met leurs familles en difficultés financières", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières. L'organisation demande au chef de la magistrature, l'ayatollah Mahmoud Shahroudi, la libération immédiate des neuf journalistes actuellement incarcérés.
Le 9 mars, Alireza Eshraghi, journaliste de Hayat-é-No, a été libéré contre une caution de 25 millions de tomans (environ 25 000 euros). Il avait été arrêté le 12 janvier, peu après la fermeture de Hayat-é-No, intervenue après la publication d'une caricature, le 8 janvier. Cette dernière représentait un homme âgé, à la barbe blanche, vêtu d'une longue robe noire et assis par terre, avec le pouce d'une main géante pressant sur sa tête (et l'inscription "Roosevelt" sur la manche). Ce dessin avait été publié en 1937 dans un journal américain pour illustrer les pressions du président Roosevelt sur la Cour suprême américaine.
Le même jour, Narghues Mohammadi, journaliste à Peyam Ajar, a été condamnée à un an de prison avec sursis pour avoir accordé des interviews à des médias lors de la détention de son mari, Taghi Rahmani, journaliste de l'hebdomadaire Omid-é-Zangan. Le 4 novembre 2002, elle avait été convoquée par le tribunal révolutionnaire de Téhéran pour "trouble à l'ordre public". La journaliste, qui demeure en liberté, serait sous le coup de nouvelles poursuites judiciaires.
Le 10 mars, Ahmad Zeid-Abadi, journaliste du quotidien réformateur Hamchahri et du mensuel Iran-é-Farda, a été condamné, en appel, à treize mois de prison et cinq ans d'interdiction "d'activité publique et sociale", dont le journalisme. Il a écopé de huit mois pour "propagande contre le régime" et cinq mois pour "publication de fausses nouvelles". Le 17 avril 2002, Ahmad Zeid-Abadi avait été condamné par le tribunal de la presse à vingt-trois mois de prison et l'interdiction pendant cinq ans de toute activité publique et sociale pour "propagande contre le régime islamique et ses institutions". Le tribunal lui reprochait notamment "ses discours provocateurs et menaçants pour la sécurité nationale". "Si le condamné ne répond pas à la convocation pour aller en prison, il sera arrêté", a affirmé M. Tashakori, adjoint du procureur de Téhéran.
Entre le 26 et le 28 février, Kambiz Kaheh, journaliste des revues cinématographiques, Cinema-Jahan, Majaleh Film, Donyai Tassvir, Cinema-é-No, Said Mostaghasi, journaliste de Haftehnameh Cinema, Mohammad Abdi, rédacteur en chef du mensuel Honar Haftom, et Amir Ezati, de Mahnameh Film, ont été arrêtés à leur domicile. Dans le même temps, Sepideh Abroaviz, Narghess Vishkai, Assal Samari, Yasamin Soufi et Mehrnaz Téhérani, toutes journalistes pour la presse cinématographique, étaient interrogées par Adareh Amaken, une section de la police téhéranaise habituellement chargée des délits à caractère "moral" et considérée comme proche des services de renseignements.
La justice de Téhéran accuse notamment ces journalistes spécialisés dans le cinéma de "critiquer la politique culturelle du régime" et de "relations avec Siamak Pourzand", journaliste condamné à onze ans de prison pour "action contre la sécurité de l'Etat par ses liens avec des monarchistes et des contre-révolutionnaires". Par ailleurs, M. Galifab, directeur des forces de sécurité de Téhéran, a déclaré avoir trouvé, au domicile des journalistes arrêtés, de nombreux "CD immoraux".
Enfin, Abbas Abdi, directeur de l'institut de sondage Ayandeh, ancien rédacteur en chef du quotidien Salam et membre de la rédaction de nombreux journaux réformateurs, détenu en cellule individuelle, a débuté une grève de la faim à la fin du mois de février. Le 4 novembre 2002, il avait été arrêté à son domicile. Ayandeh était accusé d'avoir "reçu de l'argent d'un institut de sondage américain, Gallup, ou d'une ambassade étrangère". Cette arrestation était intervenue après qu'IRNA, l'agence de presse officielle iranienne, avait diffusé, le 22 septembre, un sondage (réalisé par la Société nationale des études de l'opinion publique et Ayandeh) qui indiquait que "74,4 % des Iraniens étaient favorables à la reprise des relations avec Washington".
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Updated on
20.01.2016