Tabassé à mort par les services de la Sécurité d’État : RSF condamne le meurtre odieux d'un journaliste indépendant en Chine
Reporters sans frontières (RSF) est horrifiée par le meurtre du journaliste indépendant chinois Sun Lin, battu à mort par des agents de la Sécurité d’État à son domicile de Nanjing. Ce crime est la conséquence directe de la guerre que livre le régime contre la liberté de la presse depuis une dizaine d'années.
Vendredi 17 novembre 2023, des agents de la Sécurité d'État chinoise ont fait irruption au domicile du journaliste indépendant Sun Lin, dans la ville de Nanjing, dans le sud-est du pays et l'ont roué de coups, rapporte le site d'information Weiquanwang. Sun Lin a été emmené à l'hôpital de la province de Jiangsu, où il a été déclaré mort trois heures plus tard. Dans les jours qui ont précédé son meurtre, Sun Lin avait partagé sur les réseaux sociaux des vidéos de manifestations contre le leader chinois Xi-Jinping qui s’étaient tenues en marge du sommet de la Coopération économique pour l'Asie-Pacifique (APEC) à San Francisco.
Alors que les proches de Sun Lin n'avaient toujours pas été autorisés à voir sa dépouille, lundi 20 novembre, les médecins leur ont déclaré que ses vêtements étaient en lambeaux lorsqu’il avait été admis à l'hôpital. Le bureau de Nanjing de la sécurité nationale a ordonné, selon les informations recueillies par RSF, à la famille et aux amis du journaliste de ne pas parler de sa mort ni d’organiser de commémoration publique.
"Cet effroyable meurtre est la conséquence directe de la paranoïa du régime chinois, laquelle conduit ses dirigeants à voir en tout média ou tout journaliste indépendant un ennemi de l'État, ce qui les expose à des représailles systématiques. Nous demandons instamment à la communauté internationale de faire pression sur le régime pour qu’il mette fin à des attaques incessantes contre la liberté de la presse et le droit à l’information.
Également connu sous le pseudonyme Jie Mu, Sun Lin a contribué à plusieurs médias ces vingt cinq dernières années, dont le site Internet d'information en mandarin Boxun, basé aux États-Unis. Une activité journalistique qui lui a déjà valu des ennuis judiciaires : en 2008, il a purgé quatre ans de prison après avoir publié un article sur des expulsions forcées et un autre sur des manifestants de la place Tiananmen; en 2016, il a de nouveau été arrêté alors qu'il prenait des photos lors du procès d'un militant des droits de l'homme, puis condamné à quatre ans de prison pour "incitation à la subversion du pouvoir de l'État".
Véritable guerre contre le journalisme
Au cours des dernières années, plusieurs journalistes et défenseurs de la liberté de la presse ont été tués pour s'être opposés à la propagande du régime.
En 2017, le lauréat du prix Nobel de la paix et du prix RSF de la liberté de la presse, Liu Xiaobo, et le blogueur dissident Yang Tongyan sont morts de cancers non traités pendant leur détention. L’année suivante, le journaliste chinois Dai Shizhong a été tué dans des circonstances troubles dans la province du Hunan. En 2021, Kunchok Jinpa, une importante source d’information sur la région autonome du Tibet pour les journalistes, a succombé à la suite de mauvais traitements.
Depuis que Xi Jinping a accédé au pouvoir en 2012, il conduit une véritable croisade contre le journalisme, comme le révèle le rapport de RSF Le Grand Bond en arrière du journalisme en Chine, publié en décembre 2021. Celui-ci détaille les tentatives de Pékin de contrôler l’information et les médias à l’intérieur et hors de ses frontières.
Située à la 179e place sur 180, la Chine occupe les tréfonds du Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2023 et constitue la plus grande prison pour les journalistes au monde avec au moins 123 d’entre eux derrière les barreaux.