Taïwan : à l’appel de RSF, six médias s'engagent pour une couverture éthique de la campagne présidentielle
Suite à un appel lancé par Reporters sans frontières (RSF) et une coalition d’organisations non gouvernementales, six médias taïwanais se sont publiquement engagés à mieux prendre en compte l'éthique journalistique dans leur couverture des élections présidentielles et législatives de janvier 2024.
Alors que la campagne pour les élections présidentielle et législatives de janvier 2024 s'intensifie à Taiwan, six médias généralistes se sont publiquement engagés à tout mettre en œuvre pour les couvrir de manière équitable, exacte, transparente et dans le respect de la vie privée des personnes. Ces médias ont ainsi répondu à un appel lancé le mois dernier par Reporters sans frontières (RSF) en partenariat avec Citizen Campaign for Media Reform (CCMR) et Taiwan Media Watch Foundation (TMWF), avec le soutien de l'Association des journalistes taïwanais (ATJ) et de l’union taïwanaise des travailleurs des médias (TMWU).
Cet appel vise à rétablir le lien entre le public et les journalistes, dans un pays qui souffre d'un des plus bas taux de confiance dans les médias parmi les démocraties (28 %) et où la communauté médiatique est souvent critiquée pour son manque d'éthique. Le pays est par ailleurs la cible régulière de campagnes de désinformation, provenant principalement de Chine.
Pour faire face à ces enjeux en matière de droit des citoyens à une information fiable, six médias se sont engagés à porter toute leur attention sur une couverture éthique des élections à venir : l’agence de presse publique Central News Agency (CNA), les radiodiffuseurs publics Chinese Television System (CTS), Public Television Service (PTS) et Radio Taiwan International (RTI), et les médias d’information privés Watchout et New Bloom.
"Cet engagement peut initier d'importantes conversations sur l'éthique journalistique dans les médias taïwanais", a souligné Brian Hioe, rédacteur en chef de New Bloom. "Les médias doivent faire preuve de vigilance dans la vérification des faits et être équitables envers tous les candidats lorsqu'ils couvrent les élections générales", insiste pour sa part Campaign for Media Reform (CCMR).
Un rempart contre la désinformation
“Le journalisme éthique est le seul mécanisme durable qui permette à une démocratie de développer une immunité naturelle contre la désinformation. Permettre à la communauté journalistique de mieux identifier les contenus abusifs avant qu'ils ne deviennent viraux est essentiel au rétablissement de la confiance du public dans les médias.
Taïwan, démocratie libérale, est victime de tentatives d'ingérences croissantes dans les médias de la part de la République populaire de Chine, qui revendique agressivement sa souveraineté sur l'île. Les journalistes taiwanais souffrent aussi d'un environnement médiatique très polarisé politiquement et dominé par le sensationnalisme et la recherche du profit.
"En raison de sa situation géopolitique particulière, Taïwan est l'un des pays les plus exposés aux campagnes de désinformation, observe alors un représentant de la fondation Taiwan Media Watch. "L'environnement médiatique taïwanais devient de plus en plus complexe en raison de l'augmentation du contenu généré par l'intelligence artificielle (IA)", a quant à lui déclaré Chris Wang, rédacteur en chef de CNA.
Pour répondre au phénomène de la désinformation en ligne, RSF et plusieurs autres organisations de la société civile ont initié le Forum sur l'information et la démocratie, qui a publié l’an dernier un ensemble de 250 recommandations. RSF a également lancé la Journalism Trust Initiative (JTI), un projet qui vise à réduire l’influence des producteurs de désinformation en encourageant les moteurs de recherche à privilégier les médias respectueux de l'éthique journalistique. Plus de 800 rédactions du monde entier utilisent actuellement JTI pour s'autoévaluer. Pour faire face au déploiement rapide de l'intelligence artificielle (IA) dans l'industrie médiatique, RSF et ses partenaires ont lancé une commission internationale pour développer une charte visant à encadrer l'utilisation de l'IA dans les médias.
Taïwan occupe le 35e rang sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse établi en 2023 par RSF. La Chine, plus grande prison au monde pour les journalistes et défenseurs de la liberté de la presse avec au moins 123 d’entre eux actuellement détenus, occupe le 179e rang.