RSF demande la levée de l'accusation de "sédition" qui pèse toujours sur Shahriar Kabir, libéré le 20 janvier suite à un jugement de la Haute Cour de Dhaka. Des dizaines de proches, de confrères et de militants des droits de l'homme ont acclamé le journaliste à sa sortie de prison.
Mise a jour - 7 février 2002
Le 5 février, un passant a été tué et plusieurs autres ont été blessés par l'explosion de bombes incendiaires lancées par des militants fondamentalistes qui protestaient contre la présence du journaliste Shahriar Kabir dans la ville de Chittagong (sud-est du pays). Plus de trois cents manifestants s'étaient réunis devant le club de la presse de la ville où Shahriar Kabir s'adressait à des dizaines de journalistes, d'intellectuels et de militants des droits de l'homme. Après que la police ait tenté de disperser la manifestation, les fondamentalistes, qui se réclamaient du "Comité de résistance contre le traître", ont lancé des bombes incendiaires. Le journaliste Shahriar Kabir a déclaré après l'incident : "les fondamentalistes essaient de me tuer et ils sont les seuls responsables de la violence actuelle".
29 janvier 2002
Le 28 janvier, on apprend que le journaliste Shahriar Kabir serait menacé par des militants islamistes et craindrait pour sa vie. Il a ainsi déclaré être suivi par les services secrets, qui lui coupent régulièrement son téléphone et censurent son courrier. Le quotidien pro-islamique Dainik Inqilab a récemment publié une série d'articles citant les propos du gouvernement selon lesquels Shahriar Kabir serait un citoyen ennemi de l'Etat et de l'islam.
21 janvier 2002
Après deux mois de détention, le journaliste et militant des droits de l'homme Shahriar Kabir a été libéré sous caution, le 20 janvier 2002, de la prison de Dhaka. Cette décision fait suite au jugement du 19 janvier de la Haute Cour qui avait exigé la libération du journaliste accusé de "sédition". Le journaliste n'a obtenu qu'une liberté sous caution de six mois, alors que sa date de procès n'a pas encore été fixée. Il risque toujours la peine de mort ou la prison à vie.
Des dizaines de personnes, dont sa famille, l'ont acclamé à sa sortie de la prison centrale de Dhaka. Ses proches n'avaient pas été autorisés à lui rendre visite au cours de sa détention. Les autorités ont tout fait pour retarder sa libération, prétextant par exemple l'absence d'un haut fonctionnaire pour la repousser de plusieurs heures.
Quelques heures après être sorti de prison, Shahriar Kabir a déclaré que sa libération est "la preuve que tout citoyen a droit à la liberté d'expression". Le journaliste a confirmé avoir comme projet de produire un documentaire sur les récentes violences contre les minorités religieuses au Bangladesh. Shahriar Kabir a enfin affirmé qu'il "continuerait à se battre contre les forces fondamentalistes" et a remercié "de tout cœur ceux qui ont fait campagne pour ma libération".
Reporters sans frontières se félicite de cette libération, mais déplore que les accusations de "sédition" qui pèsent sur le journaliste n'aient pas encore été levée. Détenu injustement pendant plus de soixante jours en vertu d'une loi d'exception, Shahriar Kabir n'a fait que collecter des informations à des fins journalistiques sur la situation des réfugiés hindous, de nationalité bangladeshi, en Inde. Aussi, l'organisation de défense de la liberté de la presse continuera à se mobiliser tant que toutes les accusations contre le journaliste n'auront pas été définitivement abandonnées. D'autant plus que la police a annoncé, le 21 janvier, qu'elle allait engager une action judiciaire contre la libération sous caution du journaliste car il est, selon elle, impliqué dans des "activités anti-Etat".
Reporters sans frontières avait rencontré l'ambassadeur du Bangladesh en France, en décembre 2001, pour demander la libération de Shahriar Kabir. Le journaliste, connu pour ses enquêtes sur les massacres lors de la guerre d'indépendance de 1971 et son combat contre le fondamentalisme, avait été reconnu "prisonnier d'opinion" par Amnesty International.
Shahriar Kabir avait été arrêté le 22 novembre 2001 à l'aéroport international de Dhaka, alors qu'il revenait de Calcutta (Inde). La police avait saisi son passeport ainsi que cinq vidéocassettes, treize cassettes audio, trois CD, plusieurs films non développés et son appareil photo. Le 9 décembre, la police a porté plainte contre le journaliste aux termes des articles 123 A (qui sanctionne la condamnation de la création de l'Etat et l'apologie de l'abolition de sa souveraineté), 124 A (concernant la sédition) et 505 A (qui réprime les préjudices causés en recourant au langage ou à d'autres moyens) du code pénal.