RSF exhorte le gouvernement mexicain à protéger la présentatrice TV Azucena Uresti après les menaces d’un chef d’un cartel de drogue dans une vidéo choquante
Après les menaces de représailles proférées hier dans une vidéo, par le chef d’une organisation de trafic de drogue à l’encontre de médias et de journalistes de l’État du Michoacán, Reporters sans frontières (RSF) exhorte le gouvernement à prendre ces menaces au sérieux et à réagir immédiatement en prenant toutes les mesures de protection nécessaires.
“Où que tu sois, je t’accompagnerai et je te ferai ravaler tes paroles même si l’on m’accuse de féminicide.” Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux le 9 août au matin, un homme qui se présente comme Rubén Oseguera, dirigeant du Cartel de Jalisco Nouvelle Génération (CJNG) – l'une des organisations de trafic de drogue les plus influentes au Mexique – profère des menaces à l'encontre des médias El Universal, Televisa et en particulier à l’encontre de Azucena Uresti, présentatrice du programme d’information Milenio. Entouré de plusieurs hommes cagoulés et lourdement armés, l'homme exige que la couverture médiatique du conflit avec d'autres groupes dans l'État du Michoacán soit "équitable".
Au lendemain de cette menace, RSF a interrogé plusieurs journalistes et correspondants dans le Michoacán. Pour des raisons de sécurité, ils ont demandé à rester anonymes. Pour eux, l’attitude menaçante du CJNG est la réaction à une série de reportages sur le cartel, dans lequel les médias locaux ont révélé des informations sensibles sur les mafieux et ont dénoncé les conditions violentes auxquelles est confrontée la population de la région des Terres Chaudes. C’est le cas en particulier dans la municipalité de Tepalcatepec où les affrontements entre les groupes armés et les déplacements forcés de populations sont constants. Les journalistes craignent des représailles et certains d’entre eux ont demandé l’aide du Mécanisme de protection.
“La vidéo choquante et révoltante diffusée par le cartel CJNG, menaçant des journalistes et des médias, rappelle des scènes d’horreur et fait grimper la violence contre la presse au Mexique vers des sommets inédits, explique le responsable du bureau Amérique latine de RSF, Emmanuel Colombié. Nous demandons au gouvernement mexicain de prendre ces menaces très au sérieux et de réagir immédiatement en mettant en œuvre toutes les mesures de sécurité nécessaires aux médias et aux journalistes qui ont été menacés, en particulier à la présentatrice Azucena Uresti. Le gouvernement mexicain a le devoir d’agir et d’empêcher de nouvelles attaques.”
Au lendemain de la publication de la vidéo, le président du Mexique, Andrés Manuel Lopez Obrador a exprimé sa solidarité envers la journaliste Azucena Uresti : “Je veux lui dire qu’elle a notre soutien. Au moment où nous avons appris l’information, j’ai donné les instructions de se rapprocher d’elle. Une communication a été établie avec elle, ainsi qu’un mécanisme de protection. Je dénonce catégoriquement ces menaces, nous n’admettons pas ce genre de situation. Nous allons protéger Azucena Uresti et tous les Mexicains. C’est notre responsabilité.”
Le Mexique demeure, année après année, l’un des pays les plus dangereux et meurtriers au monde pour les médias. Malgré quelques rares avancées récentes, le pays continue de s’enfoncer dans la spirale infernale de l’impunité. Dès lors que les journalistes s’intéressent de trop près au crime organisé, principalement au niveau local, ils sont menacés, réprimandés, voire exécutés de sang-froid.
Le Mexique occupe la 143e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse 2021 établi par RSF.