RSF en Guinée pour promouvoir la liberté de la presse et soutenir les médias bloqués
Alors que la Guinée, qui connaît une vague d’atteintes à la liberté de la presse depuis plusieurs mois, s’est dotée d’un nouveau gouvernement, Reporters sans frontières (RSF) s’est rendue à Conakry afin de faire part de ses préoccupations en matière de liberté de la presse aux autorités et de témoigner sa solidarité aux médias bloqués ou brouillés dans le pays.
Signaux de quatre radios brouillés, trois chaînes de télévision retirées des bouquets télévisuels, le secrétaire général du principal syndicat de presse guinéen détenu durant plus d’un mois… Depuis fin novembre 2023, les atteintes à la liberté de la presse s’enchaînent dangereusement dans le pays. Après la dissolution de l’ancien gouvernement le 19 février, RSF s’est rendue à Conakry, la capitale, afin de rencontrer le nouveau Premier ministre, Amadou Oury Bah, ainsi que le ministre de l’Information et de la Communication, Fana Soumah. L’organisation s’est également entretenue avec le président de la Haute Autorité de la communication (HAC), Boubacar Yacine Diallo.
Le directeur du bureau de RSF à Dakar, Sadibou Marong, et la responsable du plaidoyer, Jeanne Lagarde, ont aussi rencontré les responsables de médias guinéens – notamment ceux des stations de radios, chaînes de télévision et sites d’information qui ont été ou sont toujours inaccessibles. Ils ont également échangé avec les associations de presse et le Syndicat des professionnels de la presse en Guinée (SPPG), dont le secrétaire général, Sékou Jamal Pendessa, a été détenu durant plus d’un mois au début de l’année 2024 pour avoir appelé à manifester contre les atteintes à la liberté de la presse.
Lors de la conférence de presse organisée par RSF avec son partenaire local, l'Alliance des médias pour les droits humains (AMDH), les responsables des médias privés Djoma et FIM ont fait état de leurs préoccupations, rappelant la situation inédite que connaissent leurs médias depuis bientôt quatre mois. Le directeur général de Djoma Média – dont la radio et la chaîne de télévision sont actuellement bloqués –, Kalil Oularé, a déploré “la phase critique de l’histoire que traversent les médias en Guinée”, qui s’illustre par “la volonté de musellement des médias en les privant de leurs ressources”. RSF leur a témoigné sa solidarité et son soutien.
Le brouillage des signaux de radios très écoutées en Guinée et le retrait de certaines télévisions des bouquets satellitaires violent le droit à l’information plurielle en Guinée. Nous avons rencontré des médias impactés par ces entraves, à qui nous réitérons tout notre soutien. Nous avons signalé et condamné auprès du Premier ministre ces violations de la liberté de la presse, lui demandant d’apporter urgemment des réponses pour y mettre fin. L’organisation a également émis des recommandations concrètes pour favoriser le journalisme de qualité, libre et fiable. Le paysage médiatique guinéen doit retrouver sa vitalité et il est nécessaire que les journalistes puissent exercer leur métier librement et de manière responsable, et que les médias brouillés puissent reprendre leurs activités afin d’assurer l’accès des citoyens à une information plurielle.
Lors de la rencontre avec RSF, le Premier ministre Amadou Oury Bah, a indiqué sa “ferme intention de continuer le dialogue avec les responsables de médias”, dans un “contexte d’apaisement des deux côtés”, appelant aussi la presse “à plus de professionnalisme”.
Les radios Evasion, Espace, Djoma et FIM font l’objet d’un brouillage constant depuis fin novembre 2023, sans explication. En décembre, la Haute Autorité de la communication (HAC), l’organe de régulation des médias, a demandé le retrait des chaînes de télévision privées Djoma TV, Evasion TV et Espace TV des bouquets Canal+ pour des raisons de “sécurité nationale” et “jusqu’à nouvel ordre”, privant les citoyens de leur droit d’accéder à une information plurielle. Les médias empêchés d’exercer se sont vus obligés de réduire considérablement leurs programmes, voire de cesser leurs activités, ou de diminuer les salaires des journalistes, voire de les mettre au chômage technique.
Le 6 mars, le Premier ministre Amadou Oury Bah avait rencontré des représentants des associations de presse et plusieurs patrons de médias, dont ceux victimes de restrictions, afin de développer des solutions pour “sortir de la crise”. RSF avait salué un pas en avant devant être suivi d’effets.