RSF demande aux autorités du Kurdistan irakien de libérer Qahraman Shukri et les trois autres journalistes détenus

Qahraman Shukri termine la première année d'une peine de sept ans de prison au Kurdistan irakien. Mais le 18 septembre, sa mère a envoyé au président du gouvernement régional une lettre demandant la libération accélérée du journaliste.  Qahraman Shukri est l'un des quatre journalistes toujours détenus au Kurdistan irakien. Reporters sans frontières (RSF) demande au gouvernement régional kurde de les libérer immédiatement et de cesser l’arrestation des journalistes dans son territoire.

“Si le gouvernement kurde tient vraiment à se présenter comme une autorité soucieuse de l'état de droit, il doit agir comme tel, déclare le bureau Moyen-Orient de RSF. Nous lui demandons instamment de libérer Qahraman Shukri et les trois autres journalistes emprisonnés, et d'arrêter de harceler les journalistes.” 

La mère de Qahraman Shukri, Khula Taha Ali, avait lancé le 18 septembre un appel aux dirigeants kurdes d'Irak pour qu'ils annulent la peine de prison prononcée contre son fils. Les forces de sécurité du Parti démocratique kurde (PDK) avaient arrêté le jeune journaliste de Roj News à son domicile dans la ville de Shiladze le 27 janvier 2021. Depuis, Qahraman Shukri est détenu dans la prison de la ville de Duhok, où il purge une peine de sept ans de prison sans charge officielle

Sa lettre a été envoyée dans l'espoir d'un changement d'attitude de la part des autorités kurdes, notamment après la libération du reporter kurde irakien Omed Baroshki, en février 2022, et d'autres militants emprisonnés en juin dernier. 

Cependant, d'autres journalistes indépendants n'ont pas eu autant de chance. Trois autres restent derrière les barreaux dans la région autonome au nord de l’Irak. Sherwan Sherwani, Guhdar Zebari et Ayaz Karam avaient été arrêtés en octobre 2020 et condamnés à six ans de prison pour “déstabilisation de la sécurité et de la stabilité de la région du Kurdistan”.

Tous trois ont rejoint un mouvement de grève de la faim dans la prison d'Erbil où ils étaient détenus. Un mouvement initié par la majorité des “82 prisonniers de Dohuk”, des journalistes, activistes et citoyens kurdes interpellés en octobre 2020 lors d'un mouvement de protestation organisé dans cette ville du nord de la région autonome. 

Contacté par RSF en septembre 2021, le gouvernement régional du Kurdistan (GRK) avait assuré que les condamnations n’étaient“pas liées aux activités journalistiques des prévenus”. Mais selon les sources de RSF, l'emprisonnement des journalistes aurait été une punition suite à des articles critiques qu'ils avaient publiés sur la corruption et les violations des droits de l'homme dans le gouvernement régional du Kurdistan. 

Les journalistes avaient également couvert des manifestations dans la ville de Sheladze, contre la présence de bases militaires pour la Turquie, un puissant allié du PDK. 

Sherwan Sherwani, journaliste indépendant, avait enquêté sur les cas d'écrivains et de journalistes kurdes assassinés dans le gouvernement régional du gouvernement kurde depuis 1991. 

Avant sa dernière arrestation, Qahraman Shukri a été détenu à deux reprises. Une fois le 6 janvier, lorsqu'il a été convoqué par les forces de sécurité, et une autre le 27 juin. Selon des sources proches du journaliste, les autorités lui avaient demandé de cesser de se renseigner sur la mort de son père, Shukri Zaynadin. Lui-même un journaliste avec la chaîne KNN, il a été tué en décembre 2016. 

Le gouvernement kurde tient à se présenter comme une force démocratique dans une région par ailleurs autoritaire. Il affirme à RSF qu'il y a "une séparation claire entre la juridiction du tribunal et le gouvernement", qu'il "respecte l'indépendance du pouvoir judiciaire, engagé dans un système cohérent de freins et contrepoids" et "ne peut interférer dans le processus judiciaire". Il affirme que le Conseil judiciaire du Kurdistan est "pleinement attaché à l'état de droit, à des procédures judiciaires équitables et impartiales".

Mais si la situation dans le Kurdistan irakien est mieux classée dans le baromètre de RSF que ses voisins, elle reste loin de représenter un environnement sain pour la libre circulation de l'information. Alors que le nombre d'emprisonnements est relativement bas, le nombre de détentions augmente de façon alarmante, ciblant particulièrement les journalistes travaillant pour des médias critiques envers les partis au pouvoir. 

Le 6 août, Ayub Ali, le reporter de KNN, a été arrêté à son domicile à Erbil. Les forces de sécurité ont également arrêté Abdulwahab Ahmad, le cameraman de KNN. Ils ont été relâchés quelques heures plus tard. 

Rzgar Kochar, Hersh Qadir et Omed Chomani, tous reporters de NRT, ont été arrêtés devant leur bureau de télévision à Erbil et emmenés à Asayish, avant d'être libérés six heures plus tard. 

Le 17 Septembre, les forces de sécurité kurdes - les Asayish - de Sulemaiyah ont arrêté les journalistes Brwa Asaad et Botan Garmyani de Roj News ainsi que le caméraman Mohammed Aziz. Ils n'ont été relâchés que le lendemain.

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