Le 7 décembre 2015, les locaux de la chaîne pakistanaise Express News à Sargodha, au Pendjab, ont été visés par une attaque à la bombe artisanale. Cet attentat, qui s'inscrit dans une vague d’attaques contre les rédactions de plusieurs médias à travers le pays, témoigne de la passivité des autorités pakistanaises et de l'absence de mesures efficaces de protection des médias.
Le 7 décembre 2015, deux individus à moto ont lancé une bombe artisanale à l’entrée des locaux de la chaîne d’information
Express News à Sargodha, au Pendjab (est du pays). L’explosion a blessé un garde et endommagé un véhicule appartenant au média. La chaîne
Express News, considérée comme libérale, a déjà fait l’objet de
plusieurs attaques revendiquées par les Talibans.
Moins d'une semaine plus tôt, les bureaux de la chaîne
Din News à Lahore (nord-est) ont été ciblés par une attaque à la grenade, lors de laquelle un employé de la chaîne et deux policiers ont été blessés. Des pamphlets du groupe Etat islamique ont été éparpillés aux alentours des locaux de la chaîne, menaçant de poursuivre les attaques jusqu’à ce que les médias «
reviennent à un journalisme neutre » ou «
reviennent à la vérité de la charia et de l'Islam ». Les responsables de cette attaque se sont enfuis à moto et n’ont pas été appréhendés à ce jour. Le 24 novembre dernier, les locaux de la web-TV
Gawahi à Karachi ont été incendiés. Les studios, ordinateurs de la chaîne chrétienne ont été détruits.
Gawahi avait déjà fait l’objet de menaces, qui avaient été rapportées aux autorités de Karachi. Des caméras de surveillance avaient été installées, mais leurs enregistrements ont été détruits par l’incendie. Le 20 novembre au soir, des individus à moto ont fait exploser une grenade dans les bureaux de
Dunya News à Faisalabad (Nord-est), avant de prendre la fuite. L’explosion a blessé trois employés de la chaîne. Des pamphlets de la branche du Khorasan de l'Etat islamique auraient été retrouvés sur le lieu de l’attaque.
«
Nous dénonçons l'inaction des autorités qui démontrent une absence totale de volonté politique en matière de sécurité des médias, déclare Benjamin Ismaïl, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières.
Tous ces médias avaient fait l’objet d'avertissements de la part de groupes extrémistes. Les autorités locales auraient dû prendre des mesures fortes pour assurer la sécurité du personnel des rédactions menacées. Il est temps que le gouvernement de Nawaz Sharif réagisse et réponde aux recommandations des organisations de défense de la presse et aux demandes des unions de journalistes pakistanais. »
RSF exhorte notamment les autorités pakistanaises à :
- allouer davantage de ressources matérielles et humaines à la surveillance et la protection des rédactions de médias
- organiser le renforcement de la sécurisation des locaux de médias : gardes, caméras de surveillance, barrières d’entrée...
- mettre en place un système d’alerte efficace permettant à la police d’intervenir au plus vite en cas d’attaque
Selon plusieurs journalistes pakistanais, les groupes extrémistes s’attaqueraient de plus en plus aux rédactions des médias afin que ces dernières reprennent la couverture de leurs activités. Après l’attaque d’une école à Peshawar en décembre 2014 qui avait tué plus d’une centaine d’enfants, les autorités pakistanaises avaient interdit aux médias pakistanais de couvrir les activités des groupes militants et terroristes.
Le Pakistan,
159e sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse 2015, est l’un des pays pilotes du
Plan d’Action des Nations Unies sur la sécurité des journalistes et la question de l’impunité.