RFI et l’AFP déposent plainte contre X pour tortures au Burundi
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Reporters sans frontières soutient la démarche de RFI et l’AFP pour obtenir justice pour l’agression dont a été victime leur correspondant Esdras Ndikumana. La lenteur de la justice burundaise dans cette enquête illustre le climat d’impunité qui règne dans le pays concernant les crimes contre les journalistes et les médias.
Dans une dépêche publiée hier soir, RFI et l’AFP annoncent avoir porté plainte contre X pour tortures auprès de la Cour Suprême de Justice à Bujumbura, à la suite de l’agression de leur correspondant au Burundi, Esdras Ndikumana, le 2 août 2015.
Les deux médias dénoncent l’absence de toute avancée dans l’enquête - pourtant annoncée et souhaitée par la présidence de la République dans un communiqué daté du 13 août 2015. Une correspondance adressée au président, le 22 septembre, détaillant les faits et les acteurs de l’agression du journaliste étant restée sans réponse, l’AFP et RFI ont décidé de saisir la justice burundaise pour obtenir des réponses. Esdras Ndikumana, le journaliste agressé, a également déposé une plainte à titre personnel.
“Il est extrêmement préoccupant que cette enquête n’ait toujours pas produit de résultat tangible, déclare Clea Kahn-Sriber, responsable du bureau Afrique de Reporters sans frontières. D’autant que l’agression d’Esdras Ndikumana a eu lieu au grand jour, dans les locaux de la Documentation… Il ne devrait pas être très compliqué de retrouver les responsables. Nous demandons à la justice burundaise de ne pas accepter de pressions politiques et de tout mettre en oeuvre pour que les responsables de cette agression soient identifiés et traduits en justice.”
Depuis le début de la crise politique dans le pays, en avril 2015, les agressions commises contre les journalistes n’ont jamais fait l’objet de poursuites en justice. Au contraire, l’impunité qui règne face à ces attaques encourage les forces de l’ordre à continuer leurs menaces et exactions contre les professionnels des médias. Ainsi, le journaliste Jean Claude Ciza, qui, après avoir été violemment battu en pleine rue au début de septembre, a continué à faire l’objet de plusieurs menaces de mort, sous forme verbale, de la part des forces de l’ordre et à dû se mettre à l’abri hors de Bujumbura.
Une autre enquête judiciaire qui patine porte sur la réouverture des radios fermées depuis le 14 mai 2015. A la suite d’attaques contre plusieurs d’entre elles lors du putsch, deux enquêtes avaient été ouvertes, l’une pour identifier les responsables des attaques, l’autre pour examiner les responsabilités des journalistes ayant diffusé le message des putschistes à l’antenne.
Selon les informations disponibles, la première enquête a été close - sans qu’aucune arrestation ou identification des coupables n’ait été rendue publique. La deuxième, en revanche, tarde à concrétiser des éléments contre les journalistes et semble donc surtout servir de prétexte aux autorités burundaises pour surseoir à la réouverture des médias fermés, jugés hostiles au pouvoir.
« Les médias ont pour rôle et devoir de couvrir l’actualité, poursuit Clea Kahn-Sriber . Si le gouvernement burundais juge que certains journalistes sont allés au delà de leur mandat, ce n’est pas une raison suffisante pour contraindre l’ensemble du médias à fermer. Nous demandons au procureur de Bujumbura de diligenter cette enquête afin de permettre la réouverture rapide des médias, un gage nécessaire du retour à la normale au Burundi.”
Le Burundi occupe la 145ème place sur 180 pays dans le Classement 2015 de Reporters sans frontières.
Publié le
Updated on
20.01.2016