RDC : RSF et JED formulent 10 préconisations pour renforcer le droit de la presse
Reporters sans frontières (RSF) et Journaliste en Danger (JED), son partenaire en République démocratique du Congo (RDC) proposent dix recommandations pour renforcer la nouvelle loi sur la presse et l’exercice du journalisme dans le pays.
Alors qu’une nouvelle loi sur la presse est sur le point d’entrer en vigueur, après avoir été adopté par le Conseil des ministres, par le Sénat et promulgué par le président de la République à la mi-mars, RSF et son partenaire JED interpellent les autorités sur les insuffisances notables d’un texte, qui contient toutefois des avancées évidentes.
Les équipes des deux organisations se sont entretenues avec plusieurs personnalités politiques dont le ministre de la Communication et des médias, Patrick Muyaya, et la ministre de la Justice, Rose Mutombo Kiese.
“En adoptant ce texte qui se fonde sur les recommandations des travaux des États généraux de la presse organisés il y a un an, les autorités s’inscrivent résolument dans une dynamique positive pour la liberté de la presse, déclare le directeur du bureau Afrique subsaharienne de RSF Sadibou Marong. Mais comme nous le leur avons rappelé, plusieurs dispositions de cette loi doivent être renforcées. Nous regrettons notamment que les sanctions privatives de liberté pour des infractions telles que la diffamation et l'injure existent encore. Nous appelons les autorités à les abroger le plus rapidement possible.”
Parmi les manquements relevés par RSF : le maintien du délit de presse sans définition claire de ce qu’il peut recouvrir. Cette loi ne prévoit pas non plus de mécanismes précis et contraignants permettant d’assurer le respect de l’indépendance, du pluralisme et de la fiabilité des médias de service public. Si le secret des sources y est inscrit comme un droit, le texte ne précise pas les garanties applicables en la matière.
“ll est urgent que les autorités congolaises prennent des mesures concrètes pour appliquer certaines dispositions concernant également la sécurité et la protection des journalistes, dans un contexte de crise sécuritaire persistante, particulièrement à l’Est du pays, et de montée des tensions politiques pré-électorales, ajoute Tshivis Tshivuadi, Secrétaire général de JED. Adopter une nouvelle loi est une chose, la faire respecter par tous en est une autre".
Dès lors, alors que la RDC s’achemine vers des élections présidentielles prévues en décembre, RSF et JED établissent une série de propositions pour renforcer le cadre légal concernant la presse et améliorer les conditions d’exercice des journalistes dans le pays.
- Assurer la sécurité des reporters qui couvrent des manifestations et le processus électoral ;
- Fournir des formations pratiques en matière de sécurité aux professionnels des médias, afin que les journalistes soient préparés aux potentiels risques sur le terrain et encourager la mise en place dans les rédactions de protocoles de sécurité et de kits individuels de premiers secours ;
- Redynamiser le mécanisme de sécurité pour la protection des journalistes déjà existant, en y intégrant des membres du ministère de la Justice ;
- Ouvrir des enquêtes systématiques et appropriées lors de cas avérés de menaces ou violences à l’encontre de journalistes afin de garantir que les auteurs d’actes répréhensibles contre les journalistes soient poursuivis et traduits en justice ;
- Amender le plus rapidement possible les dispositions problématiques du texte de loi sur la presse ;
- Opérer un travail de vulgarisation de la loi sur la presse, afin que les journalistes, principaux concernés, puissent en avoir parfaitement connaissance
- Garantir que le nouveau Code du numérique, récemment promulgué mais pas encore signé au Journal officiel de la République, ne soit pas utilisé pour contourner la récente loi sur la presse et détenir les journalistes exerçant en ligne ;
- Encourager les médias à s’engager pour la qualité en se faisant certifier Journalism Trust Initiative (JTI). RSF vient de réaliser en RDC le 12ème rapport de transparence : 12 médias du pays ont rendu public leur degré de conformité avec les nombreux critères de qualité de la norme établie, comme les standards ISO.
- Promulguer la loi sur l’accès à l’information d’intérêt public ;
- Rendre gratuit le coût des accréditations des journalistes de la presse étrangère, et l’accorder à tous ceux qui veulent se rendre dans le pays sans risque d'expulsions.