A l'approche du Congrès du Parti communiste, les autorités répriment les journalistes et les citoyens qui tentent de contester le monopole de l'Etat sur l'information. Reporters sans frontières a demandé au responsable de la propagande de cesser la répression à l'encontre de ceux qui tentent de briser l'étau de la censure.
21.05.2002
Jin Wei, Li Xiangdong, Shu Jianqiu et Li Wei, membres de Falungong, ont respectivement été condamnés, le 18 mai, à des peines de seize ans, quinze ans, neuf ans et sept ans de prison par la cour populaire intermédiaire de Chongqing (sud-ouest du pays). Selon l'agence de presse Xinhua, un cinquième adepte impliqué dans le piratage, Liu Chunshu, est décédé de "maladie" en détention. Les cinq membres du mouvement spirituel avaient interrompu, le 1er janvier 2002, les programmes câblés du district de Chongqing pour diffuser des documentaires sur le Falungong. Jin Wei, considéré comme le cerveau de l'opération de piratage, a notamment été reconnu coupable d'avoir "organisé et utilisé un culte dans le but de faire obstruction à la loi et de saboter les installations de télévision".
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23.04.2002
Dans une lettre adressée au responsable du Département de la propagande du comité central du Parti communiste (PCC), Ding Guangen, Reporters sans frontières (RSF) a exprimé son indignation face à la répression exercée contre les journalistes et les citoyens chinois qui tentent de contester le monopole de l'Etat et du Parti communiste sur l'information. "Au cours des dernières semaines, nous avons appris l'arrestation d'un journaliste, la fermeture d'un magazine, l'inculpation d'adeptes de Falungong pour diffusion de documents interdits dans les médias et une vague de répression dans le Xinjiang. Tous ces éléments prouvent une nouvelle fois que le gouvernement chinois applique par la force son monopole incontesté sur les médias", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de l'organisation. "L'arrestation de personnes qui tentent pacifiquement d'avoir accès aux médias est une violation flagrante et grave du droit à une information pluraliste. Sans se prononcer sur les idées avancées par des mouvements religieux tels que Falungong, Reporters sans frontières considère que tous les Chinois, sans discrimination raciale, religieuse ou sociale, doivent pouvoir s'exprimer dans les médias", a ajouté M. Ménard. RSF a demandé au responsable de la propagande de cesser la répression à l'encontre de ceux qui tentent de briser l'étau de la censure.
Selon les informations recueillies par RSF, le régime chinois a intensifié sa répression contre les publications non autorisées dans la région du Xinjiang à majorité ouïgoures. Selon plusieurs associations de défense des droits de l'homme ouïgour, l'administration chinoise, notamment le Département des Affaires culturelles, a procédé à la saisie et à la destruction de nombreux livres et publications dans la région d'Urumqi (capitale de cette région occidentale). Les services de sécurité ont ainsi organisé, au cours du mois de mars 2002, des autodafés de publications ouïgours. Enfin, les autorités de Pékin auraient demandé, le 25 mars, à ses représentants au Xinjiang de "mettre de l'ordre" dans la presse de cette région secouée par des mouvements séparatistes. Selon le pouvoir de Pékin, des "organisations séparatistes tentent depuis l'étranger de prendre le contrôle des médias".
Au mois de mars, la presse chinoise et étrangère a cette fois été empêchée de couvrir les grandes grèves ouvrières dans la ville de Liaoyang (nord du pays). Seuls quelques journaux locaux et la télévision publique ont abordé ce mouvement mais en dénonçant les leaders ouvriers comme des criminels ayant enfreint la loi. Quatre d'entre eux sont toujours détenus.
A Pékin cette fois, Wang Kun, rédacteur en chef du magazine Huaxia Yingcai (Le chinois brillant), doit être jugé dans les prochaines semaines par une cour de Pékin pour avoir "publié illégalement" ce magazine et "entravé l'ordre social et le marché". Selon le quotidien South China Morning Post, l'arrestation du journaliste a fait suite à l'interdiction de ce magazine d'information enregistré à Hong Kong et non pas en Chine populaire comme l'oblige la loi. Créé en 1996 à Pékin, le mensuel Huaxia Yingcai affirmait vendre plus de cent mille exemplaires en Chine populaire, notamment parmi les cadres du Parti communiste. Peu critique à l'égard du régime communiste, le magazine avait pourtant publié en février 2001 une interview du prix Nobel de littérature Gao Xingjian considéré par Pékin comme un "proscrit". Mais selon un officiel en charge de la répression des "publications illégales", cité par le South China Morning Post, le Huaxia Yingcai n'a jamais été autorisé à être publié et diffusé. Les autorités semblent reprocher au responsable du magazine d'avoir tenté d'abuser de la confiance des lecteurs et des annonceurs en utilisant un nom de journal proche de Zhonghua Yingcai, soutenu par le président de l'Assemblée nationale, Li Peng.
Par ailleurs, neuf adeptes du mouvement spirituel Falungong ont été inculpés, le 18 avril, pour avoir "favorisé une secte diabolique afin de nuire au respect de la loi", par une cour de Changchun (nord-est du pays). Les autorités reprochent à Falungong d'avoir diffusé illégalement, début mars, sur un réseau de chaînes de télévision par câble, deux documentaires sur les persécutions à l'encontre de ce mouvement interdit depuis juillet 1999. Cette diffusion, rendue possible par un piratage des ondes des télévisions, avait provoqué la colère des autorités. La police chinoise avait alors traqué pendant plusieurs semaines les adeptes de Falungong à Changchun. Après avoir arrêté une vingtaine de suspects, les autorités ont affirmé qu'il s'agissait "d'un crime organisé et prémédité avec un objet clairement diabolique". Les adeptes risquent une peine allant jusqu'à quinze ans de prison.
Au même moment, le responsable des pages économiques du Journal de Guangzhou (sud du pays) a été interrogé par la police pendant plusieurs heures après la publication involontaire de deux poèmes attribués au leader du Falungong, Li Hongzhi. Selon le journal de Hong Kong Wen Wei Po, le journaliste aurait été arrêté au début du mois d'avril après la publication, le 30 mars, de ces deux textes qui, à travers des métaphores économiques, parlent de souffrance et de salut spirituel.
La répression a également touché la secte protestante Huanan Jiaohui (Eglise de Chine du Sud). Ainsi, en décembre 2001, un tribunal de la province du Hubei (centre du pays) a condamné à mort Li Ying, la nièce du pasteur Gong Shengliang, pour avoir publié et diffusé une revue clandestine Huanan Zhuankan (Edition spéciale de Chine du Sud). Cette publication permettait à la secte de diffuser, depuis 1994, ses informations parmi ses adeptes. Reporters sans frontières n'est pas en mesure de confirmer si cette personne a été exécutée.
Enfin, en février 2002, le ministère de la Communication a établi une liste des dix défauts de la presse chinoise, notamment celui de "porter atteinte aux Comités du parti communiste", d'être "trop indépendante" ou de "valoriser le journalisme à l'occidental". En effet, à l'approche du Congrès du Parti communiste, en octobre 2002, au cours duquel Hu Jintao va être désigné Président, les Départements de la propagande et de la sécurité publique ont été chargés de mettre fin aux critiques, notamment dans la presse.