Répression en perspective contre les radios communautaires, accusées d’“incitation au délit”
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Après la purge qui a sévi au sein des médias publics depuis le coup de force institutionnel contre le président Fernando Lugo, le 22 juin dernier, les radios communautaires pourraient très vite subir les foudres du nouveau pouvoir.
L’Union des radiodiffuseurs du Paraguay (URP) avait été l’un des premiers organismes professionnels à se réunir avec le gouvernement de Federico Franco dans les heures qui avaient suivi la destitution de l’ancien chef de l’État. Au cours d’un entretien, le 13 août, avec le procureur général de l’État, Javier Díaz Verón, le président de l’URP, Javier Correa, a réclamé que soient combattues “plus de 1 200 radios pirates présentes dans le pays” qu’il accuse d’“inciter au délit en de nombreuses occasions”. Le même a sollicité auprès de la Commission nationale des télécommunications (CONATEL) la révocation des licences de toutes les stations de radios compromises dans des “actes illégaux”, sans toutefois préciser lesquels. Javier Correa assure avoir obtenu une réponse favorable des autorités, la CONATEL s’étant déjà engagée, le 8 juillet, à démanteler quelque 200 radios communautaires qui opéreraient sans autorisation.
“Personne ne saurait être dupe du vernis légal et administratif dont se prévaut le représentant des principaux médias audiovisuels privés et commerciaux du pays, qui ont presque tous mené campagne en faveur du coup d’État parlementaire contre Fernando Lugo. Ce lobbying sert directement les intérêts d’un gouvernement contesté. Les radios communautaires, issues des mouvements sociaux, appuient pour la plupart la mobilisation citoyenne en cours depuis la destitution du 22 juin. Veut-on croire que cette mobilisation s’arrêtera en réduisant ces radios au silence ? Que restera-t-il alors des principes de liberté d’expression et de pluralisme ? En cédant à des pressions économiques et politiques de cet ordre, le gouvernement romprait définitivement avec le socle constitutionnel et la convention américaine des droits de l’homme”, a déclaré Reporters sans frontières.
“Seule une loi de télécommunications ménageant un égal espace pour tous les types de médias audiovisuels (publics, privés et communautaires) et garantissant leur indépendance, peut permettre de sortir de l’actuelle impasse. Que le porte-parole des groupes audiovisuels dominants du pays aille réclamer la censure contre d’autres supports d’expression est particulièrement inadmissible”, a ajouté l’organisation.
Déjà présente depuis la destitution du 22 juin, l’inquiétude sur le sort des radios communautaires s’est encore amplifiée, le 31 juillet dernier, lorsque trois fonctionnaires de la CONATEL ont tenté de mener une “visite d’inspection” dans les locaux de Radio Candela à Encarnación (Sud). La station, propriété de l’organisation féministe Kuña Róga (“Maison de la femme”, en langue guarani), émet depuis dix ans à l’appui d’une autorisation établie par la CONATEL. Les fonctionnaires ont pourtant argué devant la rédaction d’un “fonctionnement irrégulier”, avant de devoir se retirer faute d’avoir présenté les documents administratifs requis, et en l’absence de représentant légal de Radio Candela. La station avait retransmis quelques jours plut tôt une manifestation locale contre le gouvernement de Federico Franco.
Photo intérieure : Coco Arce, Ápe Paraguay
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20.01.2016