Onze ans après l’assassinat de Regina Martínez, RSF demande des réponses à la justice mexicaine
L’enquête sur l’assassinat de la journaliste mexicaine Regina Martínez, correspondante de l’hebdomadaire Proceso dans l’État de Veracruz, a été entachée de nombreuses irregularités. RSF et Propuesta Cívica, son partenaire local, demandent à la Cour suprême mexicaine de reconnaître à l'hebdomadaire la qualité de victime indirecte, afin de relancer l’investigation.
Journaliste renommée et correspondante locale depuis douze ans pour le magazine d’investigation Proceso, Regina Martinez enquêtait sur les liens entre la classe politique de l’État de Veracruz, à l'est du Mexique, et les cartels, lorsqu’elle a été retrouvée chez elle sans vie, étranglée dans sa salle de bain, à Xalapa le 28 avril 2012. Pourtant, les autorités mexicaines, dont l’enquête est entachée de nombreuses irrégularités, ont totalement négligé la piste reliant l’assassinat de Regina Martinez à son travail journalistique.
En 2021, RSF et son partenaire local Propuesta Cívica avaient déposé une plainte auprès du parquet fédéral mexicain spécialisé dans les atteintes à la liberté d’expression (FEADLE) pour faire reconnaître devant la justice le statut de victime indirecte de l’hebdomadaire Proceso, dans le but de relancer l’enquête. Après le refus du parquet spécialisé, c’est désormais la Cour suprême mexicaine, saisie de l’affaire depuis le 24 octobre 2022, qui doit se prononcer.
Dans l'attente de cette décision, RSF a co-organisé une conférence de presse en hommage à Regina Martinez ce 28 avril 2023 à Mexico, pour faire le point sur les enjeux judiciaires autour de cette affaire emblématique de la situation des journalistes dans le pays.
Regina Martinez est l’une des premières journalistes d’un média national enquêtant sur les liens entre la classe politique et le narcotrafic à avoir été assassinée au Mexique. Son assassinat a marqué un tournant concernant les conditions de sécurité et de liberté de la pratique du journalisme dans le pays. Plusieurs investigations journalistiques ont montré que l’enquête avait été bâclée. Une décision favorable de la Cour suprême pourrait non seulement contribuer à ce que l’enquête soit relancée, mais aussi créer un précédent historique en matière de lutte contre l’impunité des crimes commis contre les journalistes au Mexique
Regina Martinez était une professionnelle passionnée, reconnue et admirée par ses pairs. Son travail lui avait valu de figurer sur la liste noire des journalistes surveillés par les autorités locales. Dans ses articles, elle accusait régulièrement les gouverneurs de l’époque d’avoir laissé l’État de Veracruz aux mains du cartel ultra-violent des Zetas. Avant d’être tuée, elle s'apprêtait à publier des informations sur le sort de milliers de personnes mystérieusement disparues dans l'État.