Mozambique : deux journalistes remis en liberté provisoire après plusieurs mois de détention
Reporters sans frontières (RSF) demande que les charges fictives pesant sur deux journalistes mozambicains soient abandonnées. Ils avaient été arrêtés en début d’année pour leur couverture de l’insurrection islamiste dans le nord-est du pays.
Après plus de quatre mois derrière les barreaux, Amade Abubacar, reporter pour la télévision locale Nacedje de Macomia et son confrère et collègue Germano Daniela Adriano, arrêté quelques semaines plus tard, viennent d’être remis en liberté provisoire au Mozambique. Les deux journalistes restent poursuivis pour diffusion de messages “portant atteinte aux forces armées du Mozambique”.
Amade Abubacar avait été arrêté le 5 janvier dernier alors qu’il recueillait des témoignages de familles fuyant les violences liées une insurrection islamiste qui sévit dans le nord-est du pays. Il avait ensuite été inculpé le 16 avril, soit bien après le délai légal de 90 jours qui prévaut pour un placement en détention provisoire.
“Leur libération est un soulagement, mais il serait prématuré de se réjouir trop vite car les deux journalistes restent poursuivis, prévient Arnaud Froger, responsable du bureau Afrique de RSF. Les charges montées de toutes pièces contre ces deux reporters doivent être abandonnées sans délai tout comme la politique d’intimidation des professionnels de l’information désireux de couvrir l’insurrection islamiste qui touche le nord-est du Mozambique. A quelques mois des élections générales, il n’est pas acceptable que les autorités transforment une partie du pays en trou noir de l’information.”
Verrouillage de l’information
En décembre, le journaliste d'investigation Estacio Valoi, travaillant pour le quotidien Zambeze, avait été arrêté pendant deux jours alors qu’il effectuait un reportage sur les conditions de vie des habitants de Cabo Delgado.
“Nous avons beaucoup de difficultés, même avec une carte de presse, à accéder cette région, confirme un journaliste de la capitale joint par RSF. Les autorités refusent de communiquer. Le dernier bilan officiel remonte au mois d’octobre alors que nous recevons quasi quotidiennement des informations faisant état de nouvelles violences”.
Les médias internationaux ne sont pas épargnés par ce verrouillage de l’information. Plusieurs d’entre eux souhaitant se rendre dans les régions en proie à des violences sont toujours en attente d’une accréditation, plusieurs semaines après avoir effectué leur demande. Selon Human Rights Watch, les autorités mozambicaines avaient refusé d’accréditer une équipe de la BBC en juin 2018, estimant le sujet “embarrassant”.
Après avoir perdu six places en 2018, le Mozambique (103e) a de nouveau reculé de 4 places au Classement mondial de la liberté de la presse publié par RSF en 2019.