Meurtre d’Issam Abdallah au Liban : quatre enquêtes indépendantes confirment les conclusions de RSF et révèlent qu’un obus israélien a tué le journaliste
Les enquêtes d’Amnesty International, de Human Rights Watch (HRW), de l’Agence France-Presse (AFP) et de Reuters, ont abouti à des conclusions concordant avec celles de Reporters sans frontières (RSF) concernant l’attaque du 13 octobre 2023 au Liban, qui a tué le reporter de l’agence Reuters Issam Abdallah. RSF se joint à leur appel pour l’ouverture d’une enquête internationale pour crime de guerre commis par Israël.
Lors d'une conférence de presse commune tenue ce 7 décembre dans la capitale libanaise, les organisations non-gouvernementales (ONG), Amnesty International et Human Rights Watch (HRW) ont révélé les résultats de leurs enquêtes sur l’attaque du 13 octobre qui a tué le journaliste Issam Abdallah et blessé six de ses confrères, à Alma el-Chaab au sud du pays. Les agences de presse Reuters et l’Agence France-Presse (AFP) ont également publié leurs enquêtes à ce sujet ce 7 décembre.
Conclusion : selon toutes ces investigations, le photojournaliste de l'agence Reuters a été tué, le 13 octobre 2023, par un obus de char israélien. C’est, dès lors, pour Amnesty International une “attaque directe contre les civils qui doit faire l’objet d’une enquête en tant que crime de guerre". L'enquête démontre que “l’armée israélienne savait, ou auraient dû savoir, que le groupe de personnes sur lequel elle tirait était composé de civils”, précise à RSF le chercheur à la division Moyen-Orient et Afrique du Nord de HRW, Ramzi Kaiss. Il s’agit, continue-t-il, d’une attaque “apparemment délibérée qui devrait faire l'objet d'une enquête de crime de guerre."
L’enquête de RSF publiée le 29 octobre révélait, en ce sens, que l'endroit où se trouvaient les journalistes avait été visé par deux frappes consécutives en provenance de l’est, direction de la frontière israélienne, et que les journalistes étaient clairement visibles sur zone et identifiables.
"Les enquêtes indépendantes menées par Human Rights Watch, Amnesty International, l’AFP et Reuters, concordent avec les conclusions de RSF quant au fait que le lieu où se trouvaient les journalistes, clairement identifiables, a été pris pour cible par une frappe venant de la direction d'Israël. Ces nouvelles investigations ont pu prouver que c’est un tir israélien qui a tué le journaliste Issam Abdallah et blessé Christina Assi et ses cinq autres confrères. À la lumière de ces nouvelles informations, RSF se joint à l’appel d’Amnesty International et de HRW, pour demander une enquête internationale et impartiale sur un possible crime de guerre commis par Israël contre les sept journalistes au Liban.”
C’est en analysant des séquences vidéo, des photographies et des fragments d'armes sur le site, au Liban, à la frontière avec Israël, et en interrogeant des témoins, qu’Amnesty International et HRW ont pu déterminer avec certitude que le premier tir, celui qui a tué Issam Abdallah et grièvement blessé la correspondante de l’Agence France Presse (AFP) Christina Assi, provenait d’un obus de 120 mm de char israélien. Selon Amnesty International, il s'agit “très probablement d’un projectile M339, fabriqué par l'entreprise israélienne IMI Systems [...] L'analyse indique qu'il a été tiré depuis une position israélienne proche de Jordeikh, à l'est des journalistes”. Les journalistes étaient “très probablement visibles et identifiables par les militaires israéliens au moment de l'attaque," estime HRW.
"Nous ne prenons pas les civils pour cible", a déclaré le porte-parole du gouvernement israèlien Eylon Levy lors d'une conférence de presse télévisée, lorsqu'il a été interrogé sur les conclusions des rapports de Reuters, de l'AFP, d'Amnesty International et de HRW.
L'attaque israélienne du 13 octobre qui a tué Issam Abdallah a également blessé ses six confrères. Si les photojournalistes irakiens de Reuters Thaer al-Sudani et Maher Nazeh ont été légèrement blessés, la correspondante libanaise d'Al Jazeera Carmen Joukhadar et le photojournaliste Elie Brakhya ont tous deux été grièvement blessés et hospitalisés pendant deux semaines. Christina Assi a, quant à elle, été grièvement blessée et a passé plusieurs semaines en soins intensifs. Le photographe américain de l’AFP Dylan Collins a lui aussi été blessé lors de la deuxième frappe. Il avait déjà été gravement blessé par l'explosion d'un drone russe trois mois auparavant, en juillet 2023, alors qu'il couvrait la guerre en Ukraine.