Liban : un juge tente d’interdire aux médias de citer l’ambassadrice américaine
Un juge libanais a interdit aux médias locaux de diffuser les propos de l’ambassadrice américaine qui avait critiqué le Hezbollah dans une précédente interview. Reporters sans frontières (RSF) dénonce une ingérence dans les affaires des médias et rappelle l’importance du pluralisme pour la liberté de la presse.
Peu de temps après la diffusion samedi 27 juin d’une interview de l’ambassadrice américaine à Beyrouth Dorothy Shea sur le média saoudien Al-Hadath dans laquelle elle critiquait le Hezbollah, un juge de Tyr a interdit à la diplomate d’apparaître dans les médias locaux pendant un an et défendu ces derniers de relayer ses déclarations ou de l’interviewer à leur tour. Le juge a estimé que ses propos pouvaient “porter atteinte à la sécurité du peuple”.
La décision a été vivement critiquée par la ministre de l’Information Manal Abdel Samad au motif que “personne n'a le droit d'empêcher les médias de rapporter les informations et de restreindre la liberté des médias”. La ministre a ajouté que le différend devait se régler en passant par le ministère de l’Information, le syndicat des journalistes et le Conseil national des médias, un organe consultatif. Le juge n’a en effet pas la compétence pour imposer ce genre d’interdiction.
“Cette tentative d’un juge de s’ingérer dans les affaires de la presse et des médias est une violation flagrante au droit à l’information, dénonce Sabrina Bennoui, responsable du bureau Moyen-Orient à Reporters sans frontières (RSF). Dans un pays aussi riche de communautés que le Liban, où le pluralisme est indispensable, les médias doivent pouvoir interroger tous les courants d’opinion, même s’ils sont critiques d’un mouvement politique puissant.”
Malgré la décision du juge, les médias libanais ont tout de même relayé dimanche l’interview de l’ambassadrice et l’ont interrogée à leur tour, comme la chaîne locale MTV. Ils s’exposaient à une interdiction d’exercer et à une amende de 200 000 dollars.
Le Liban occupe la 102e place au Classement mondial pour la liberté de la presse établi par RSF.