Liban : RSF et dix organisations appellent l’ONU à mener une enquête sur l’attaque israélienne qui a tué Issam Abdallah
Un mois avant l'anniversaire de la mort du journaliste Issam Abdallah, tué par une frappe israélienne, alors qu’il était en reportage dans le sud du Liban, Reporters sans frontières (RSF) et dix organisations ont adressé une lettre à la Commission d'enquête des Nations unies sur le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est et Israël. Ce courrier vient appuyer la demande d'enquête sur ce crime formulée par la famille du reporter en juillet 2024.
Malgré une abondance de preuves accumulées dans cinq enquêtes indépendantes, dont celle de RSF, ayant révélé que le reporter de l’agence de presse Reuters Issam Abdallah a été tué par des tirs ciblés israéliens à Alma el-Chaab au sud du Liban, l'impunité persiste.
Selon les conclusions des agences de presse Reuters et l'Agence France-Presse (AFP), et des ONG Human Rights Watch et Amnesty International, les tirs qui ont tué, le 13 octobre 2023, le photojournaliste et blessé ses confrères de l’AFP, de Reuters, et d’Al-Jazeera provenaient d'un char israélien. Une sixième enquête, menée par la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL), affirme, selon Reuters, qu'“un char israélien a tué le reporter de Reuters Issam Abdallah au Liban en tirant deux obus de 120 mm sur un groupe de ‘journalistes clairement identifiables’, en violation du droit international”.
Sur la base de ces résultats, RSF et dix organisations ont adressé ce 13 septembre une lettre aux Nations Unies lui intimant de mener une enquête officielle sur cette attaque. Le courrier a été transmis spécifiquement à la Commission d'enquête de l’ONU en charge d'investiguer sur d'éventuels crimes internationaux et violations du droit international relatif aux droits de l'homme commis en Israël et dans les territoires palestiniens occupés depuis le 7 octobre 2023.
Par cette lettre, RSF et les cosignataires expriment leur soutien à une demande similaire d’enquête sur les circonstances du meurtre d'Issam Abdallah formulée par la famille du reporter en juin dernier et restée à ce jour sans réponse.
“Issam Abdallah a été tué par l’armée israélienne, caméra à la main, vêtu de son gilet siglé ‘PRESS’ et de son casque. Dans le contexte de la violence croissante contre les journalistes dans la région, ce crime bien documenté dans de nombreuses enquêtes ne doit pas rester impuni. La justice pour Issam ouvre une voie solide vers la justice pour tous les reporters. Nous exhortons la Commission à se saisir de cette affaire et à nous aider à mener les auteurs de cette attaque odieuse contre des journalistes courageux et professionnels à rendre des comptes.”
Depuis le meurtre d'Issam Abdallah, les entraves à la justice persistent et l’impunité demeure. Ni le Liban, où le crime a eu lieu, ni Israël, accusé de l'avoir commis, ne sont signataires du statut de Rome, ce qui empêche tout recours à la Cour pénale internationale (CPI).
En mai dernier, des députés libanais ont proposé que le Liban puisse saisir la CPI pour qu’elle enquête sur les crimes commis dans le sud du Liban depuis le 7 octobre, par une disposition exceptionnelle permise par le statut de Rome. Malgré le soutien du ministère de l'Information et du gouvernement libanais, la mesure a été bloquée à la dernière minute. Les autorités israéliennes n'ont, quant à elles, pas publié de conclusions sur le meurtre malgré les sollicitations et leurs propres affirmations. En décembre, un porte-parole militaire israélien a déclaré à Reuters que “l'incident a[vait] eu lieu dans une zone de combat active et [était] en cours d'examen”.
Deux autres journalistes ont été tués au Liban depuis octobre 2023. Les journalistes Farah Omar et Rabih Maamari de la chaîne de télévision Al-Mayadeen ont également été victimes de frappes israéliennes dans le sud du Liban. Selon les informations recueillies auprès de journalistes libanais, la frontière sud est devenue une zone dangereuse pour les reporters, et peu de professionnels d'agences internationales ou locales osent désormais s'y rendre. Depuis octobre 2023, dans le contexte de la guerre à Gaza, les tirs transfrontaliers entre les forces israéliennes et le Hezbollah se sont intensifiés.