La levée de l'état de siège ne garantit pas le retour à une information pluraliste
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La levée de l’état de siège, le 6 octobre 2009 par le président de facto Roberto Micheletti, une semaine après son entrée en vigueur, ne signifie malheureusement pas une restauration réelle de la liberté de la presse. En suspendant, le 28 septembre, les libertés publiques fondamentales, le gouvernement issu du coup d’État du 28 juin a obtenu la fermeture des deux principaux médias d’opposition, la station Radio Globo et la chaîne Canal 36.
Radio Globo réussit à diffuser, en dépit de la censure, par le biais d’Internet, depuis un studio clandestin monté dans un quartier de Tegucigalpa. Toutefois, le média ne peut espérer fonctionner à nouveau normalement qu’au terme d’une nouvelle procédure auprès de la Conatel (Commission nationale des télécommunications), qui lui a repris sa fréquence. Il doit également récupérer ses équipements, confisqués le 28 septembre par les forces de l’ordre. Quant à la chaîne Canal 36, son matériel a été entièrement détruit lors de l’intervention militaire menée le même jour dans ses studios.
“Sur la forme, le rétablissement des libertés publiques ne change rien puisque la répression se poursuit et que les voix d’opposition ont été réduites au silence”, a déploré auprès de l’organisation Bertha Oliva, coordinatrice générale du Comité des familles de détenus et disparus au Honduras (Cofadeh). En province, Radio Progreso, proposée pour le prix Reporters sans frontières 2009 dans la catégorie “Médias”, a résisté aux tentatives de censure. “La communauté a fait bloc chaque fois que les militaires ou la police ont voulu envahir les studios”, a-t-on signalé à l’organisation.
“Le retour à l’antenne de Radio Globo et Canal 36, l’une des conditions posées par Manuel Zelaya à la reprise du dialogue, est un pas indispensable vers le rétablissement de l’État de droit au Honduras. Nous en sommes loin. D’autre part, comment les élections du 29 novembre que le gouvernement de facto veut à tout prix organiser peuvent-elles présenter un visage démocratique en l’absence de pluralisme au sein de la presse ? La mission de l’Organisation des États américains (OEA) doit obtenir du gouvernement de facto la restitution ou le remplacement des équipements et des fréquences”, a déclaré Reporters sans frontières.
“Si Reporters sans frontières a condamné depuis le début le traitement infligé à la presse étrangère et aux médias d’opposition par le gouvernement de facto, il n’est pas question de cautionner le moindre discours haineux, quelle qu’en soit la provenance. C’est pourquoi nous condamnons sans la moindre réserve les propos antisémites monstrueux tenus par le directeur de Radio Globo, David Romero”, a ajouté l’organisation.
Selon le Latin American Herald Tribune, le président Manuel Zelaya a évoqué en plusieurs occasions “l’appui de mercenaires israéliens” aux militaires putschistes. En écho à ces propos, David Romero a déclaré à l’antenne “regretter que Hitler n’ait pas pu mener son projet à son terme”(sic). Lors d’un entretien donné à l’agence Associated Press (AP), le directeur de Radio Globo a présenté des excuses, évoquant l’origine juive de son propre grand-père. “Radio Globo est défendable en tant que média d’opposition injustement censuré, mais cesserait de l’être en devenant un média de la haine”, a conclu Reporters sans frontières qui met une nouvelle en fois en garde, dans un tel climat de polarisation, contre la tentation du fanatisme et de la rhétorique du complot.
(Photo: AFP)
Publié le
Updated on
20.01.2016