L’enquête sur les forces de l’ordre doit prendre en compte les attaques contre les journalistes
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Le Venezuela, secoué depuis deux mois par d’intenses mouvements de protestation populaires, voit quotidiennement manifestants et forces de l’ordre s’affronter dans des rixes souvent violentes. Reporters sans frontières salue la décision du Parquet général, qui a annoncé le 13 avril 2014 le lancement d’une enquête sur 97 membres des forces armées et de la police nationale pour tortures et mauvais traitements. L’organisation demande à ce que les attaques contre les journalistes soient pleinement prises en compte par cette enquête, qui se doit, pour être crédible, de faire preuve d’indépendance et d’impartialité. Depuis le début des violences le 12 février 2014, le Syndicat national vénézuélien des travailleurs de la presse (SNTP) a recensé 181 agressions contre des journalistes, quels que soient leur média ou leur ligne éditoriale.
“Reporters sans frontières rappelle que le rôle de l’armée et des forces de police est de protéger la population des débordements susceptibles de survenir lors des soulèvements, et en aucun cas d’empêcher les journalistes de faire leur travail. L’adoption d’une résolution par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies sur la sécurité des journalistes dans le cadre de manifestations pacifiques en mars dernier remet en évidence le rôle crucial joué par les journalistes dans la couverture de ces mouvements sociaux”, déclare Camille Soulier, responsable du bureau Amériques de Reporters sans frontières.
Reporters sans frontières a signalé à plusieurs reprises les abus commis par les deux bords à l’encontre des journalistes. Dans une lettre du 26 février 2014 au président de la République Nicolás Maduro, l’organisation avait condamné les nombreuses atteintes à la liberté de l’information qui sévissaient dans le pays, et appelé à ce que les autorités sanctionnent les responsables de ces agressions.
Mildred Manrique, reporter pour le quotidien privé 2001, a subi des abus policiers à deux reprises. Agressée une première fois alors qu’elle couvrait le soulèvement du 18 février 2014, son domicile est fouillé un mois plus tard le 22 mars 2014. Soupçonnée de terrorisme en raison de la présence de gilets pare-balles et de masques à gaz dans son appartement, la journaliste a ensuite été détenue pendant plusieurs heures et son matériel de travail lui a été confisqué.
Également dans le collimateur des forces armées, les journalistes étrangers subissent les divers abus policiers. Le journaliste italien Giafranco di Giacomantonio, qui couvrait la manifestation du 24 février 2014 dans la province d’Aragua pour le journal Abruzzo, a été arrêté et destitué de son matériel avant d’être mis en détention pendant 12 heures. Le journaliste a dû compter sur l’aide de diplomates italiens pour sa libération.
L’organisation souligne que si cette décision du Parquet général constitue une avancée dans le combat contre l’impunité, la responsabilité des manifestants et des délinquants qui profitent des troubles généraux pour s’en prendre aux journalistes ne doit pas être oubliée. Ainsi, le 10 avril 2014 dans l’Etat de Zulia, le siège de la radio progouvernementale Zyvke Mundial dirigée par Oscar Pérez a fait l’objet d’un attentat au cocktail Molotov envoyé par un groupe d’individus qui n’ont pour le moment pas été identifiés.
Le Venezuela figure à la 116e position sur 180 pays dans l’édition 2014 du classement mondial pour la liberté de la presse publié par Reporters sans frontières.
Photos: Mariana Vincenti
Publié le
Updated on
20.01.2016