Iran : après la grâce accordée à la journaliste Hengameh Shahidi, RSF appelle le guide suprême à libérer tous les journalistes emprisonnés
A l’instar de la journaliste Hengameh Shahidi, qui, après deux ans de détention, vient d’être graciée et libérée, Reporters sans frontières (RSF) demande à Ali Khamenei de remettre en liberté tous les journalistes emprisonnés dans la République islamique.
“Je suis libre à compter d’aujourd’hui.” Dans une vidéo publiée sur son compte Twitter le 24 février dernier, la journaliste Hengameh Shahidi annonce elle-même la bonne nouvelle et explique : “A la suite de mes protestations contre les fausses accusations et l'injuste condamnation à 12 ans de prison dont j’ai été victime, le bureau d'Ali Khamenei, guide suprême de la Révolution islamique, a désigné une commission d’enquête pour vérifier mon dossier. Après investigations, celle-ci a conclu que les accusations et les procédures de ma condamnation, menées notamment par l’ancien procureur de Téhéran Abbas Jafari Dolatabadi, l’ancien chef du pouvoir judiciaire Sadegh Amoli Larijani et certains autres fonctionnaires de justice, s’avèrent injustes, abusives et illégales.”
La journaliste Hengameh Shahidi, qui est aussi la directrice du blog Paineveste, a été arrêtée le 25 juin 2018, alors qu’elle sortait de l'hôpital. Elle a été condamnée le 1er décembre de cette même année à l’issue d’un procès à huis clos, pour ses révélations sur l’injustice qui règne au sein du système judiciaire iranien et ses critiques envers le chef du pouvoir judiciaire, Sadegh Amoli Larijan. En mai 2019, cette peine a été confirmée par la 36e chambre du tribunal d’appel de Téhéran. Malgré son fragile état de santé, elle a été détenue à l’isolement pendant 13 mois.
« RSF salue la libération d’une journaliste qui ne faisait que son métier et qui n’aurait jamais dû passer ne serait-ce qu’un seul jour en prison, déclare le responsable du bureau Iran/Afghanistan de RSF, Reza Moini. Mais cette libération constitue aussi une jurisprudence, et RSF demande qu’elle soit appliquée pour chaque journaliste emprisonné depuis 2009, date de la désignation de Sadegh Amoli Larijani comme chef du pouvoir judiciaire et d’Abbas Jafari Dolatabadi à la tête du parquet de Téhéran par le guide suprême. »
RSF rappelle qu’en Iran, la justice n’est en rien indépendante : elle est contrôlée par le guide suprême qui, selon l’article 110 de la Constitution, nomme le chef du système judiciaire. En 2009, Sadegh Amoli Larijani avait ainsi été choisi pour organiser la répression du mouvement protestataire contre la réélection de Mahmoud Ahmadinejad. Pendant 10 ans, durée de ses deux mandats, plus de 300 journalistes et citoyens-journalistes ont été arbitrairement arrêtés et lourdement condamnés à l’issue de procès iniques.
Alors même que Sadegh Amoli Larijani a été démis de ses fonctions en 2019, lors de la guerre de succession à la plus haute position du régime, Ali Khamenei reste le véritable prédateur de la liberté de la presse et le responsable de la répression des libertés fondamentales en Iran. Gracier une journaliste ne change rien à la nature de l’un des régimes les plus liberticides au monde pour l’information.
L’Iran se situe à la 173e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse de RSF.