Irak : RSF et MENA Rights Group appellent l’ONU à obtenir la libération immédiate du journaliste kurde Sherwan Sherwani
Reporters sans frontières (RSF) et l’organisation MENA Rights Group (MRG) saisissent des experts des droits de l’homme des Nations unies afin qu’ils fassent pression sur les autorités irakiennes pour obtenir la libération immédiate du journaliste Sherwan Sherwani, détenu par les autorités kurdes.
L’arrestation arbitraire du journaliste Sherwan Sherwani, détenu au Kurdistan irakien depuis un mois et demi, et les allégations de torture sur sa personne ont conduit RSF et l’organisation suisse MRG à saisir, le 27 novembre dernier, les Rapporteurs spéciaux des Nations unies sur la torture et sur la liberté d’expression et le Groupe de travail sur les disparitions forcées. Les deux organisations leur demandent de tout mettre en œuvre pour obtenir sa libération immédiate et inconditionnelle.
Dans leur saisine, RSF et MRG soulignent l’illégalité de l’arrestation et de la détention du journaliste au regard du droit irakien, dénoncent les tortures qu’il a subies et appellent à ce qu’une enquête impartiale et indépendante soit conduite sur sa disparition forcée et les sévices dont il a été victime en détention.
Sherwan Sherwani a été arrêté le 7 octobre dernier à son domicile par une dizaine d’hommes en civil puis détenu pendant 19 jours dans un lieu et pour des motifs inconnus de sa famille et de son avocat. Ce n’est que le 26 octobre que son avocat a pu enfin le voir au centre de détention des service de renseignements basé à Erbil, capitale du Kurdistan irakien, et être informé des tortures qu’il avait subies lors de ses interrogatoires et du fait qu’il était placé en isolement carcéral.
“Il en va de la dignité humaine et de l’intégrité physique et psychique du journaliste qu’il soit immédiatement libéré, déclare le responsable juridique de RSF, Paul Coppin. Nous appelons les experts des droits de l’homme de l’ONU à s’assurer qu’il retrouve la liberté sans attendre et que les responsables des sévices qu’il a subis soient poursuivis, conformément aux normes internationales.”
L’arrestation de Sherwani a fait suite à des accusations formulées sur Twitter par un haut responsable du Kurdistan irakien, selon lesquelles il aurait reçu des "financements étrangers dans le but de déstabiliser le pays" (un crime passible de la prison à vie), aurait mis en danger la vie des juges et aurait encouragé le recours à la violence lors de manifestations. Alors qu’aucun élément n’a été avancé à l’appui de ces accusations, selon les informations recueillies par RSF et MRG, ce sont en réalité les critiques de Sherwan Sherwani à l’encontre du Premier ministre du Kurdistan, Masrour Barzani, et plus particulièrement ses enquêtes journalistiques sur l’implication de ce dernier dans la mort de journalistes et défenseurs des droits de l’homme au Kurdistan irakien, qui expliquent son arrestation.
Sherwan Sherwani n’était pas inconnu des autorités kurdes irakiennes, qui l’avaient déjà harcelé et intimidé à de multiples reprises en représailles de son travail journalistique. Une enquête sur une affaire de corruption au sein des cercles politiques du Kurdistan lui avait par exemple valu une arrestation en 2012. Plus récemment, en 2019, il avait été interpellé après avoir couvert une manifestation à la frontière turque.
L’Irak occupe la 162e place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2020.