Impunité pour les policiers impliqués dans le passage à tabac d'un journaliste
Organisation :
Lundi 28 mai 2007, le ministre de l'Intérieur, Roumen Petkov, a rendu publiques les conclusions de l'enquête menée par son ministère concernant le passage à tabac, le 16 mai dernier, du photojournaliste Emil Ivanov. A l'instar de l'armée - dont les forces de police dépendent - le ministère de l'Intérieur a considéré que les policiers ne s'étaient pas rendus coupables d'agression et ne seraient pas sanctionnés.
« Reporters sans frontières est choquée par la décision de Roumen Petkov. Cela revient à faire passer le message que la police est libre de faire ce que bon lui semble, sa parole est au-dessus de toute autre et elle est au-dessus des lois. Ce n'est pas compatible avec l'Etat de droit qui doit prévaloir dans les pays membres de l'Union européenne, que la Bulgarie a rejointe récemment», a déclaré l'organisation.
“Les policiers interrogés dans cette affaire - identifiés grâce aux photos d'autres journalistes présents sur les lieux - nient avoir frappé le journaliste et ont déclaré avoir l'intention de le poursuivre pour “diffamation”, a ajouté Reporters sans frontières .
Emil Ivanov, du journal Express, fera prochainement appel de la décision du procureur militaire. Il envisage de porter cette affaire devant la Cour européenne des droits de l'homme, s'il devait se voir débouté en Bulgarie. Le journaliste ne pourra pas, en revanche, interjeter appel de la décision du ministère de l'Intérieur puisque cette dernière est le fruit d'une enquête interne.
---------------------------------------------------------
22 mai 2007
Reporters sans frontières “scandalisée” par la décision de ne pas poursuivre les policiers suspectés du passage à tabac d'un journaliste
“Reporters sans frontières est scandalisée par la décision des autorités de ne pas poursuivre, pour manque de preuves, les policiers suspectés d'avoir passé à tabac le journaliste Emil Ivanov, le 16 mai 2007. Nous espérons que le ministre de l'Intérieur, Roumen Petkov, tiendra ses engagements et que les agresseurs du photographe feront au moins l'objet de lourdes sanctions disciplinaires. Il est impensable que des représentants de l'ordre puissent agresser un journaliste dans l'exercice de ses fonctions et ne pas être sanctionnés. Au lendemain des premières élections européennes dans le pays, un recul des autorités dans cette affaire irait à rebours des valeurs défendues par l'Union”, a déclaré l'organisation.
“Reporters sans frontières apporte son soutien à l'action de protestation organisée à l'initiative du Club des photographes et cameramen bulgares, le 23 mai 2007 à neuf heures, devant le ministère de l'Intérieur. Nous nous joignons aux professionnels de l'information pour rappeler aux autorités politiques qu'aucune société civile ne peut perdurer sans information libre et indépendante”, a ajouté Reporters sans frontières.
Interrogée par Reporters sans frontières, Danka Vasileva, rédactrice en chef d'Express, a déclaré que le ministre de l'Intérieur s'était engagé à lui faire connaître le 23 mai à midi ses conclusions. “Je veux croire que le ministre sera fidèle à ses promesses. Il serait choquant de voir les forces de police mobilisées pour la protection d‘un témoin - qui n'est pas officiellement protégé - mais autorisées à frapper un photographe.”
Le 16 mai 2007, Emil Ivanov, 55 ans, couvrait la sortie du tribunal de Mladen Mihalev, entendu comme témoin dans le procès des meurtriers de l'un de ses anciens associés Milcho Bonev. Son témoignage a été entouré de mesures de sécurité inédites. Le trafic automobile dans la capitale a été dévié, le témoin a été autorisé à se présenter accompagné de ses propres gardes du corps et tous les journalistes ont été systématiquement fouillés avant d'entrer dans la salle d'audience. Alors qu'il photographiait les policiers en faction protégeant la sortie de Mladen Mihalev, Emil Ivanov a été pris à partie par ces derniers, qui lui ont demandé ce qu'il faisait. Le journaliste a déclaré qu'il faisait son travail, se trouvait dans un lieu public et qu'il en avait parfaitement le droit. Après lui avoir demandé d'effacer ses photos, ils ont essayé de se saisir de son appareil photo et l'ont traîné à l'intérieur du bâtiment avant de refermer la porte. Une collègue, Maria Nikolaeva, présente sur les lieux, l'a entendu crier qu'on le battait et demander d'aller chercher de l'aide. Emil Ivanov a, par la suite ,déclaré avoir été battu à coups de poing et de pied, jusqu'à ce qu'il accepte d'effacer ses photos, et être jeté dans la rue. Il a subi un examen médical qui a conclu que ses blessures étaient compatibles avec ses déclarations .
Publié le
Updated on
20.01.2016