Hong Kong : RSF dénonce la détention prolongée de membres de l’équipe d’Apple Daily, trois ans après la fermeture du quotidien

Depuis la fermeture forcée, il y a trois ans, du plus grand journal indépendant en langue chinoise de Hong Kong, Apple Daily, sept des membres de l’équipe du quotidien, dont son fondateur Jimmy Lai, sont toujours détenus et attendent le verdict quant aux accusations fallacieuses d’atteinte à la sécurité nationale les visant. Reporters sans frontières (RSF) demande leur libération immédiate et la fin de leur détention prolongée sans procès équitable.

Il y a trois ans, le 24 juin 2021, Apple Daily, le plus grand quotidien indépendant en langue chinoise de Hong Kong, a été contraint de fermer ses portes suite à une descente de près de 500 policiers dans ses locaux et au gel des actifs de sa maison mère imposé par le gouvernement. À la fin de cette journée, la dernière édition du journal a atteint un tirage record d'un million d'exemplaires, soit dix fois plus que la moyenne quotidienne. 

À ce jour, sept anciens membres de l’équipe d’Apple Daily, dont son fondateur Jimmy Lai, sont toujours détenus et risquent la prison à vie en vertu de la loi sur la sécurité nationale. Pour justifier ses accusations, le gouvernement a compilé plus de 150 articles, tribunes et vidéos publiés par le quotidien, qualifiés de “criminels” en vertu de cette loi draconienne.

“Trois ans plus tard, la fermeture de l'Apple Daily et le ciblage de son éditeur et de ses cadres supérieurs ont laissé un vide énorme dans le paysage médiatique de Hong Kong, marquant un tournant dans la détérioration du droit à l'information sur le territoire et ayant un impact sur la liberté de la presse dans le monde. Les autorités de Hong Kong doivent mettre fin à cette répression sans plus attendre et prendre des mesures immédiates pour inverser cette spirale alarmante, en commençant par la libération tant attendue de Jimmy Lai et de tous les membres de l’équipe d'Apple Daily emprisonnés.

Rebecca Vincent
Directrice des campagnes de RSF

La prononciation de la peine des six dirigeants d’Apple Daily a été retardée de plus de deux ans sous prétexte qu'elle ne peut avoir lieu tant que l'affaire Jimmy Lai n'a pas été jugée. Le PDG du journal Cheung Kim-hung, le rédacteur en chef Ryan Law Wai-kwong, le rédacteur en chef exécutif Lam Man-chung, l’éditeur associé Chan Pui-Man, le rédacteur en chef de l'édition anglaise Fung Wai-kong et l'éditorialiste principal Yeung Ching-kee sont maintenus en détention prolongée. Ils ont été placés en détention provisoire sans possibilité de libération sous caution, bien qu'ils aient demandé à plusieurs reprises à être libérés. Aucune indication n'a été donnée quant à la date à laquelle le tribunal rendra sa décision sur leur cas. 

Pendant ce temps, le procès de Jimmy Lai pour atteinte à la sécurité nationale, qui n'en est qu'à mi-parcours, dure déjà depuis plus de 90 jours, alors qu'il était censé durer 80 jours. Le fondateur d’Apple Daily s'est également vu refuser le droit d'être représenté par un avocat de son choix, et il n'a pas été autorisé à être jugé en présence de jurés. Début juin, l'accusation a terminé la présentation des preuves et l'affaire a été ajournée jusqu'au 24 juillet pour les déclarations intermédiaires. 

Au cours du procès, le procureur a eu recours au témoignage d'un "témoin" qui aurait été torturé et serait détenu de force dans un établissement psychiatrique. L'accusation a aussi désigné plusieurs défenseurs des droits de l'homme avec lesquels Jimmy Lai avait été en contact ces dernières années comme “co-conspirateurs” en collusion avec des forces étrangères.

Des médias indépendants fermés sous la pression

Apple Daily n'est pas le seul média à avoir disparu sous la pression des autorités de Hong Kong. En décembre 2021, la loi sur la sécurité nationale a également servi de prétexte pour fermer le site d'information en langue chinoise Stand News, tandis que le climat de peur qui pèse sur les journalistes de Hong Kong a conduit au moins cinq petits médias locaux à cesser leurs activités. Plus récemment, en 2024, Radio Free Asia et le World Street Journal ont annoncé qu'ils fermeraient leurs bureaux dans la ville, le premier invoquant la sécurité de son personnel. 

Au cours des trois dernières années, au moins 900 journalistes ont perdu leur emploi en raison de la fermeture des médias indépendants, des centaines de professionnels des médias n'ont eu d'autre choix que de s'exiler, tandis que certains journalistes étrangers et un représentant de RSF ont été interdits d'entrée sur le territoire. 

Hong Kong le 135e rang au Classement mondial de la liberté de la presse 20243 de RSF, ayant dégringolé du 18e rang en seulement deux décennies. La Chine occupe quant à elle la 172e place sur les 180 pays et territoires évalués.

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