Hong Kong : la loi “Article 23”, nouvelle mouture de la loi de sécurité nationale, augmentera encore la pression sur les journalistes

Les autorités de Hong Kong accélèrent l’adoption de la loi “Article 23", qui transpose dans le droit hongkongais la loi sur la sécurité nationale imposée par Pékin il y a quatre ans et largement utilisée contre les journalistes et les défenseurs de la liberté de la presse.

Pas moins de 212 pages passées en revue en moins d’une semaine : le 14 mars 2024, les parlementaires hongkongais ont terminé l'examen du projet de loi sur la sauvegarde de la sécurité nationale, surnommé projet de loi “Article 23”. Il avait été dévoilé par le gouvernement le 8 mars dernier, neuf jours seulement après un mois de “consultation publique” largement dénoncée comme factice.



Ce texte, que le chef de l'exécutif John Lee souhaite faire voter à toute vitesse, s'inspire largement de la loi draconienne sur la sécurité nationale (NSL) imposée par Pékin en 2020, qui punit les crimes contre l’État d’un emprisonnement à perpétuité et a largement été utilisée contre les journalistes et les défenseurs de la liberté de la presse.

"En transposant dans le droit interne hongkongais la loi de sécurité nationale imposée par Pékin il y a quatre ans, le gouvernement espère restaurer l'illusion d'un territoire régi par l'état de droit tout en poursuivant sa campagne contre les voix indépendantes. Nous appelons les démocraties à renforcer leur pression sur les autorités chinoises afin que la liberté de la presse soit rétablie sur le territoire.

Cédric Alviani
Directeur du bureau Asie-Pacifique de RSF

À  l’instar de la loi sur la sécurité nationale, le projet de loi “Article 23" est rédigé de manière vague, ouvrant la voie à toutes les interprétations, et s’applique également aux actes commis en dehors de Hong Kong. La future loi introduit de nouvelles infractions : “espionnage", "ingérence extérieure" et "vol de secrets d'État", trois crimes régulièrement invoqués en Chine continentale pour faire taire les défenseurs de la liberté de la presse. Le crime de "sédition", actuellement passible de deux ans de prison dans la loi héritée de l’époque coloniale, sera désormais puni d'une peine de dix ans.

Selon le nouveau texte, la possession de publications considérées comme "séditieuses", comme le quotidien indépendant Apple Daily, devient un crime passible de trois ans d'emprisonnement. Une personne soupçonnée de porter atteinte à la sécurité nationale peut désormais être détenue pendant 16 jours sans inculpation formelle et ne peut avoir accès à un avocat qu'au bout de 48 heures. Le simple fait de communiquer avec des organisations étrangères ou des diplomates peut être considéré comme relevant de l’"ingérence étrangère", passible de 14 ans de prison.

Le projet de loi tire son nom de l'article 23 de la loi fondamentale, la mini-constitution de Hong Kong, qui prévoit que le territoire doit adopter sa propre loi sur la sécurité nationale, mais dont la mise en œuvre avait été abandonnée à la suite de manifestations massives en 2003. En 2020, après une nouvelle série de manifestations de grande ampleur, la Chine a imposé à Hong Kong sa version de la loi sur la sécurité nationale (NSL), qui a depuis été utilisée pour poursuivre un certain nombre de journalistes et de défenseurs de la liberté de la presse, dont le fondateur d'Apple Daily, Jimmy Lai



Le territoire de Hong Kong est classé 140e dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2023 publié par RSF, alors qu’il occupait la 18e place deux décennies plus tôt. La Chine, pour sa part, figure au 179e rang sur 180 pays et territoires évalués.

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