Espagne : des journalistes violemment agressés lors de manifestations de l’extrême droite
Les manifestations anti-gouvernementales organisées par le parti d’extrême droite Vox dans plusieurs grandes villes d’Espagne ont donné lieu à de violentes attaques verbales et physiques contre des journalistes. Reporters sans frontières (RSF) condamne les discours de haine constants de Vox contre la presse qui sont à l’origine de ces agressions.
Agressions, harcèlement, insultes… Le scénario de ces attaques contre des journalistes s’est répété dans plusieurs villes espagnoles, samedi 23 mai, alors qu’à l’appel du parti d’extrême droite Vox, des manifestants défilaient en voiture et à deux-roues pour dénoncer la gestion de la crise du coronavirus par le gouvernement de Pedro Sanchez.
A Madrid, ce sont par des coups de klaxons et des interventions intempestives que les manifestants ont empêché le journaliste du réseau audiovisuel public TVE Gabriel López d’effectuer son reportage. Son caméraman et lui ont également été conspués aux cris de “pédés, communistes, vous devez dire la vérité !” - autant d’entraves à l’exercice du journalisme dénoncées par RSF Espagne sur Twitter. Lors de la même manifestation, un photojournaliste du quotidien La Razón a été brutalement agressé par plusieurs personnes qui ont jeté son appareil photo au sol et déchiré son T-shirt. Le journaliste a immédiatement déposé plainte auprès de la police.
A Ceuta, dont la mairie est aux mains du Parti populaire soutenu par Vox, plusieurs journalistes ont également signalé avoir subi des insultes, notamment racistes et islamophobes, lors de la couverture de la manifestation de samedi, comme le montre les événements partagés par un cadreur de TVE sur son compte Twitter.
“C'est un acte de cynisme sans limites, typique des mouvements extrémistes, de dire que l’on condamne les attaques contre la presse, et de les attribuer à ‘l’ennemi’ alors que c’est justement la haine des médias alimentée en permanence par Vox qui est à l’origine de cette violence”, déplore le directeur de RSF Espagne, Alfonso Armada, avant de préciser : “Vox n’a pas besoin d’assumer sa responsabilité publiquement ; nous le faisons pour lui.”
Car Vox affirme n’avoir aucun lien avec ces attaques : son porte-parole, Jorge Buxadé, a laissé entendre qu’elles auraient été effectuées par des "infiltrés d'extrême gauche". Ce qui n’a pas empêché le porte-parole de Vox Ceuta, Carlos Verdejo, de les justifier en invoquant l’affiliation de l’un des reporters agressés au parti Podemos.
Vox n’en est pas à son coup d’essai. L’année dernière déjà, RSF avait exigé de la formation qu’elle mette un terme à ses attaques contre la liberté de la presse. Avant même la période électorale, la formation politique avait ainsi imposé un blackout à certains médias, une pratique qu’elle poursuit aujourd’hui encore. “Il est interdit à certains médias de participer à des événements de Vox, et nous, les journalistes sommes directement signalés par des députés régionaux qui bénéficient de salaires publics. C’est gravissime”, dénonce le photojournaliste de ceutaactualidad.com Antonio Sempere à RSF Espagne.
L’Espagne occupe le 29e rang sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2020 établi par RSF.