Entrave à la distribution des quotidiens Clarín, Olé et La Nación : “Un procédé condamnable qui aggrave les conflits”
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Reporters sans frontières exprime toute sa réprobation devant les blocages de parution subis par les trois quotidiens Clarín, Olé (quotidien sportif issu du groupe Clarín) et La Nación, les 26 et 27 mars 2011. Interceptés dès leur sortie d’impression dans la nuit du 26 mars et retenus durant douze heures, les exemplaires de Clarín et Olé n’ont pu atteindre les kiosques. De moindre durée, le blocage infligé La Nación lui a causé d’importants retards de distribution.
“Une entrave à la diffusion d’un journal constitue en soi une atteinte à la liberté de publication, qui est une composante de la liberté d’expression. Nous condamnons un tel procédé, qui ne fait qu’aggraver et parfois mélanger plusieurs conflits touchant le secteur de la presse privée majoritaire. Tout en exigeant une enquête sur ce blocage, qui viole deux décisions de justice en faveur de la libre circulation des journaux, nous demandons aux parties en présence, qu’elles soient politiques, syndicales ou issues de médias concernés, à ne pas céder à une surenchère qui confondrait les questions de fond sans les résoudre”, a déclaré Reporters sans frontières.
Le blocage du 26 mars prend racine dans un conflit syndical entre la direction du groupe Clarín et les employés des Arts graphiques du Río de la Plata (AGR), filiale du groupe chargée de l’impression des publicités et annonces privées. Les ouvriers des AGR reprochent à Clarín une “persécution”, selon l’un de leurs délégués, Luis Siri. D’après nos informations, depuis que le groupe de presse a licencié 117 salariés en 2000, il n’a plus autorisé ses employés à élire leurs délégués. Il s’agit de la cinquième protestation du genre de la part des employés des AGR mais la première aboutissant à un blocage total de parution. Précédemment saisie sur les entraves à la circulation des journaux, la justice avait donné raison par deux fois au groupe Clarín. Néanmoins, cinq autres décisions judiciaires relatives au droit du travail avaient été prononcées en faveur des employés, mais jamais appliquées par la direction du groupe.
Du côté du groupe de presse, on met en cause la passivité de la police fédérale qui a, de fait, failli dans l’application des deux décisions de justice portant sur la diffusion des journaux. On désigne également la responsabilité directe dans le blocage de Pablo Moyano, dirigeant du syndicat des camionneurs et fils d’Hugo Moyano, leader de la Confédération syndicale du travail (CGT). Le blocage est intervenu au moment où Clarín allait publier dans son édition dominicale un article sur le patrimoine des Moyano.
Depuis, le conflit porte sur le terrain politique où l’opposition au gouvernement de Cristina Kirchner a pris fait et cause pour le groupe Clarín et convoqué au Congrès pour le 30 mars la ministre de la Sécurité, Nilda Garré. En conflit ouvert avec la Casa Rosada (siège de la présidence de la République), le groupe Clarín est, en même temps, le premier touché par la loi de services de communication audiovisuelle (SCA) qui l’oblige à terme à rendre une partie de ses fréquences. Reporters sans frontières a soutenu cette loi au nom de la nécessaire déconcentration et du pluralisme des médias. Notre organisation maintient sa position à ce sujet (lire également l’article publié dans le quotidien Página 12 le 20 octobre 2010).
“Le contexte de la loi SCA pèse évidemment sur le présent conflit, même s’il s’agit en soi d’un thème tout à fait distinct. C’est justement pourquoi nous souhaitons que toute confusion soit évitée. La question de la représentativité syndicale soulevée par les AGR est une chose et le groupe Clarín doit en répondre. La responsabilité de la force publique dans le blocage des journaux en est une autre et, en effet, le pouvoir exécutif doit s’en expliquer. Enfin, cet épisode ne peut interférer avec la loi SCA, qui doit s’appliquer conformément à son esprit”, a ajouté Reporters sans frontières.
Publié le
Updated on
20.01.2016