Des membres de la PEMRA tentent de censurer Geo News illégalement
Reporters sans frontières s’inquiète de l’ordonnance de fermeture des locaux et de suspension immédiate des licences de trois chaînes de Geo Television : Geo News, Geo Tez et Geo Entertainment prononcée par un comité formé par la Pakistan Electronic Media Regulatory Authority (PEMRA) le 20 mai 2014.
Cette décision a depuis été désavouée par la PEMRA dans un communiqué indiquant qu’elle n’avait pas de force légale puisque le comité n’avait “pas été appelé dans le respect des dispositions de l’article 3(4) du règlement de la PEMRA de 2009”. Le règlement de l'organe de régulation impose la présence d'au moins la moitié des membres - soit sept - pour que puisse être convoquée une réunion. Le comité réuni le 20 mai n'en comptait que cinq.
La PEMRA a également indiqué s’être tournée vers le Ministère de la Loi, de la Justice et des Droits de l’homme afin d’obtenir un avis juridique sur la question.
La PEMRA avait été saisie par le ministre de la défense Khawaja Muhammad Asif et chargée de trouver un moyen légal d’attaquer Geo News suite aux accusations relayées par la chaîne contre les services de renseignements, suspectés d’être à l’origine de la tentative d’assassinat contre le journaliste et présentateur de Geo News, Hamid Mir, le 19 avril dernier à Karachi.
“La décision hâtive du comité, immédiatement désavouée par la PEMRA, montre la volonté de certains représentants du pouvoir pakistanais d’interdire par tous les moyens, y compris illégaux, la diffusion de Geo News”, déclare Benjamin Ismaïl, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières. "Nous appelons la PEMRA à ne pas céder à la pression des services de renseignement et du ministre de la défense, et de mettre le droit au service de la liberté de l’information”, ajoute-t-il.
Les enquêtes d’Hamid Mir sur les actions menées par l’Inter-Services Intelligence (ISI) dans la province du Balouchistan avaient fait de lui la cible de nombreuses menaces, intimidations et de poursuites en justice. Il avait fait part de ses craintes à Reporters sans frontières et à son frère, Amir Mir, affirmant qu’une éventuelle attaque à son encontre “devrait être imputée à l’ISI et son chef, le Lieutenant Chef Zaheerul Islam”. Son frère ayant relayé ces accusations au micro de Geo News, la chaîne a été accusée d’avoir tenu des propos anti-patriotiques et victime d’une campagne visan à la discréditer au cours des semaines suivantes.
Le climat dans lequel travaillent les professionnels du groupe de médias s’est profondément détérioré suite à ces attaques, les journalistes du journal Jang et de Geo News devenant la cible de menaces de mort et de menaces. Le 5 mai, une note a été laissée dans les locaux de l’imprimerie du quotidien, accusant l’équipe de Jang et Geo News d’être “anti-patriotiques, anti-musulmans et anti-armée” et menaçant le journal de “graves conséquences” s’il ne fermait pas ses bureaux de Peshawar. Le personnel a été appelé à “démissionner immédiatement du groupe traître”. Le 15 mai, le parti politique islamique Sunni Ittehad Council a déclaré que regarder Geo News était “haram”, et appelé à son interdiction pour avoir diffusé un contenu “blasphématoire”.
Le Pakistan se positionne à la 158e place sur 180 pays dans le classement mondial de la liberté de la presse 2014 établi par Reporters sans frontières pour l’année 2014.