Dans une lettre ouverte, Reporters sans frontières demande au ministre des Affaires étrangères français de mettre les droits de l'homme au cœur des relations bilatérales avec Cuba
Organisation :
Dans une lettre adressée le 18 avril dernier à M. de Villepin, l'organisation reproche à la France de ne pas appliquer dans ses relations avec La Havane "la position commune adoptée par l'Union européenne qui conditionne l'approfondissement de ses relations avec Cuba au respect du multipartisme et des libertés fondamentales dans ce pays". Reporters sans frontières demande au chef de la diplomatie française de "multiplier les contacts et les actes de soutien en faveur des dissidents et de leurs familles".
M. Dominique de Villepin
Ministre des Affaires étrangères
37, Quai d'Orsay
75007 Paris
Paris, le 18 avril 2003 Monsieur le Ministre, Il y a un mois, jour pour jour, les autorités cubaines, profitant de l'imminence de l'offensive américaine en Irak, lançaient une vague de répression sans précédent. En moins d'une semaine, 78 dissidents dont 26 journalistes indépendants étaient arrêtés. Depuis, ces derniers ont été condamnés au cours de procès sommaires à des peines allant jusqu'à 27 ans de prison. Cuba est aujourd'hui devenue la plus grande prison du monde pour les journalistes. Reporters sans frontières est indignée que la France n'ait condamné cette vague de répression que le 9 avril, trois semaines après les premières arrestations, et après avoir demandé des "précisions" à ce sujet aux autorités cubaines, selon un communiqué officiel. Les ambassadeurs d'Espagne, d'Allemagne et du Canada ont été refoulés à l'entrée des tribunaux où se tenaient les procès des dissidents. En revanche, l'ambassadeur de France n'a pas été vu sur place et le Quai d'Orsay a refusé de confirmer si ce dernier avait fait le déplacement. Contrairement à l'Angleterre ou au Canada, la France n'a pas non plus jugé nécessaire de convoquer l'ambassadeur cubain en poste à Paris pour lui signifier son mécontentement. Par ailleurs, en décembre 1996, les Quinze pays de l'Union européenne ont adopté une position commune conditionnant l'approfondissement des relations avec La Havane au respect des libertés fondamentales et à la reconnaissance du multipartisme. La position des Quinze, qui a depuis été systématiquement renouvelée, n'est cependant pas appliquée par la diplomatie française. En 1999, Cuba a été intégré dans la "Zone de solidarité prioritaire", qui inclut les pays avec lesquels "la France entend nouer une relation forte de partenariat dans une perspective de solidarité et de développement durable". Selon une interview accordée au quotidien officiel cubain Granma par Jean Lévy, l'ambassadeur de France à La Havane, en décembre 2001, "les ressources allouées à la coopération ont été multipliées par sept puis par dix". Un nouveau protocole d'accord, visant à "renforcer la coopération bilatérale", a été signé par Pierre-André Wiltzer, ministre délégué à la Coopération et à la Francophonie, lors d'un déplacement à Cuba en février 2003. Après les fortes condamnations prononcées contre les journalistes indépendants et les dissidents cubains, Reporters sans frontières attend de la France, qui s'enorgueillit d'être la patrie des droits de l'homme, une attitude plus attentive envers l'opposition en multipliant les contacts et les actes de soutien en faveur des dissidents et de leurs familles. Par ailleurs, Reporters sans frontières demande aux autorités françaises d'appliquer dans ses relations avec La Havane la position commune adoptée par l'Union européenne qui conditionne l'approfondissement de ses relations avec Cuba au respect du multipartisme et des libertés fondamentales dans ce pays. Reporters sans frontières appelle le gouvernement à reconsidérer l'intégration de Cuba dans la zone de solidarité prioritaire dont l'un des objectifs est d'ailleurs "la consolidation de l'état de droit et l'enracinement de la démocratie" dans les pays partenaires. L'organisation vous demande également de prendre parti, au sein de l'Union européenne, pour le gel de l'examen de la demande d'adhésion de Cuba aux accords de Cotonou, qui permettent à 77 pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (Groupe ACP) de bénéficier d'une aide économique et d'un régime de préférence commerciale de l'Union européenne, tant que les prisonniers politiques dans ce pays ne seront pas libérés. La situation des droits de l'homme à Cuba, où l'information est monopole d'Etat, est contraire à l'article 9 de ces accords qui établit que le partenariat se fonde sur "le respect des droits de l'homme, des principes démocratiques et de l'Etat de droit". Certain que vous ne resterez pas insensible à cet appel, je vous prie d'agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de ma haute considération. Robert Ménard
Secrétaire général
Ministre des Affaires étrangères
37, Quai d'Orsay
75007 Paris
Paris, le 18 avril 2003 Monsieur le Ministre, Il y a un mois, jour pour jour, les autorités cubaines, profitant de l'imminence de l'offensive américaine en Irak, lançaient une vague de répression sans précédent. En moins d'une semaine, 78 dissidents dont 26 journalistes indépendants étaient arrêtés. Depuis, ces derniers ont été condamnés au cours de procès sommaires à des peines allant jusqu'à 27 ans de prison. Cuba est aujourd'hui devenue la plus grande prison du monde pour les journalistes. Reporters sans frontières est indignée que la France n'ait condamné cette vague de répression que le 9 avril, trois semaines après les premières arrestations, et après avoir demandé des "précisions" à ce sujet aux autorités cubaines, selon un communiqué officiel. Les ambassadeurs d'Espagne, d'Allemagne et du Canada ont été refoulés à l'entrée des tribunaux où se tenaient les procès des dissidents. En revanche, l'ambassadeur de France n'a pas été vu sur place et le Quai d'Orsay a refusé de confirmer si ce dernier avait fait le déplacement. Contrairement à l'Angleterre ou au Canada, la France n'a pas non plus jugé nécessaire de convoquer l'ambassadeur cubain en poste à Paris pour lui signifier son mécontentement. Par ailleurs, en décembre 1996, les Quinze pays de l'Union européenne ont adopté une position commune conditionnant l'approfondissement des relations avec La Havane au respect des libertés fondamentales et à la reconnaissance du multipartisme. La position des Quinze, qui a depuis été systématiquement renouvelée, n'est cependant pas appliquée par la diplomatie française. En 1999, Cuba a été intégré dans la "Zone de solidarité prioritaire", qui inclut les pays avec lesquels "la France entend nouer une relation forte de partenariat dans une perspective de solidarité et de développement durable". Selon une interview accordée au quotidien officiel cubain Granma par Jean Lévy, l'ambassadeur de France à La Havane, en décembre 2001, "les ressources allouées à la coopération ont été multipliées par sept puis par dix". Un nouveau protocole d'accord, visant à "renforcer la coopération bilatérale", a été signé par Pierre-André Wiltzer, ministre délégué à la Coopération et à la Francophonie, lors d'un déplacement à Cuba en février 2003. Après les fortes condamnations prononcées contre les journalistes indépendants et les dissidents cubains, Reporters sans frontières attend de la France, qui s'enorgueillit d'être la patrie des droits de l'homme, une attitude plus attentive envers l'opposition en multipliant les contacts et les actes de soutien en faveur des dissidents et de leurs familles. Par ailleurs, Reporters sans frontières demande aux autorités françaises d'appliquer dans ses relations avec La Havane la position commune adoptée par l'Union européenne qui conditionne l'approfondissement de ses relations avec Cuba au respect du multipartisme et des libertés fondamentales dans ce pays. Reporters sans frontières appelle le gouvernement à reconsidérer l'intégration de Cuba dans la zone de solidarité prioritaire dont l'un des objectifs est d'ailleurs "la consolidation de l'état de droit et l'enracinement de la démocratie" dans les pays partenaires. L'organisation vous demande également de prendre parti, au sein de l'Union européenne, pour le gel de l'examen de la demande d'adhésion de Cuba aux accords de Cotonou, qui permettent à 77 pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (Groupe ACP) de bénéficier d'une aide économique et d'un régime de préférence commerciale de l'Union européenne, tant que les prisonniers politiques dans ce pays ne seront pas libérés. La situation des droits de l'homme à Cuba, où l'information est monopole d'Etat, est contraire à l'article 9 de ces accords qui établit que le partenariat se fonde sur "le respect des droits de l'homme, des principes démocratiques et de l'Etat de droit". Certain que vous ne resterez pas insensible à cet appel, je vous prie d'agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de ma haute considération. Robert Ménard
Secrétaire général
Publié le
Updated on
20.01.2016